samedi 23 novembre 2024 15:02

Le défi migratoire

Le but de cet ouvrage est d’analyser les grandes vagues migratoires auxquelles nous sommes confrontés depuis quelques années. C’est un sujet qui suscite de nombreuses passions, et sur lequel il est même parfois interdit de réfléchir. Les accusations fallacieuses peuvent facilement tomber, doublées de mauvaises intentions et de volonté de nuire.

C’est pourtant un sujet capital. Des personnes meurent en mer, noyées. D’autres s’entassent dans des camps de fortune, vivant sous la tente et dans la boue. Elles quittent des pays en guerre, elles fuient la mort et la désolation. Face à ces drames, il est nécessaire de proposer autre chose que des postures et des positions morales préétablies. Il est nécessaire de comprendre, de réfléchir et d’aller au cœur des problèmes. C’est un des objectifs de ce livre : injecter de la raison sur un sujet passionnel.

Le droit de quitter son pays

Nous nous posons des questions simples : pourquoi partent-ils, quels chemins empruntent-ils, avec quels réseaux, quelles sont les conséquences pour l’Europe et pour les pays émetteurs, quelles sont les solutions possibles.

Le droit de quitter son pays est un droit imprescriptible. Il est normal que des populations victimes de la guerre et de la dictature fuient et cherchent à se rendre dans des pays plus cléments. Le droit de vivre et de mourir sur son sol et dans son pays est un autre droit imprescriptible. Personne ne fuit sa terre sans y être contraint. Si elles avaient le choix, les populations préfèreraient rester vivre chez elles.

Une Europe ébranlée

Dans le même temps, l’Europe se trouve ébranlée par ces mouvements migratoires. Des piliers que l’on croyait sûrs se sont effondrés en quelques semaines. Schengen, apparemment indépassable, a été renversé en quelques jours suite à la fermeture des frontières commencée par la Hongrie. Le gouvernement de Mme Merkel est aujourd’hui dans la tourmente, alors qu’à l’été 2015 personne n’imaginait que celle-ci puisse être contredite. Les Allemands accueillaient les immigrés les bras ouverts, jusqu’à ce qu’ils découvrent les difficultés d’intégration, les crimes commis par certains, et l’ampleur du phénomène. L’Europe devait nous protéger, elle se montre incapable de juguler un phénomène de grande ampleur.

Des migrations nécessaires à l’économie ?

Les migrations posent aussi la question du développement économique des pays. Beaucoup arguent du fait que faire venir des populations immigrées est une nécessité pour l’économie européenne. Comme je le démontre dans le livre, c’est un avantage éventuel pour le court terme, mais une erreur économique sur le moyen et long terme. De même, personne ne semble s’interroger sur les conséquences pour les pays émetteurs. Comment l’Afrique peut-elle se développer si ses cerveaux partent ? Il y a aujourd’hui plus de médecins africains en Europe qu’en Afrique. Alors, comment répondre aux crises sanitaires, comment soigner les enfants et les malades ? Les migrations sont un vol des ressources humaines ; les plus précieuses de toutes. À bien des égards, c’est une nouvelle forme de traite négrière.

Les défis de l’intégration

Parler des migrations c’est aussi s’interroger sur les défis de l’intégration. Comment faire vivre en Europe des populations culturellement très différentes ? Nous n’avons pas encore de réponse et, souvent, nous préférons fermer les yeux sur les réalités. Mais nous ne pouvons pas ignorer les souffrances des populations européennes qui subissent les effets négatifs de ces migrations. C’est le corps social qui est de plus en plus malmené et qui risque de se déchirer.

Ce livre s’inscrit pleinement à la suite de mes précédents ouvrages. Ayant écrit une Géopolitique du Vatican, j’ai voulu approfondir un sujet qui est souvent évoqué par la diplomatie pontificale, celui des migrations, pour essayer de comprendre si sa position était juste. De même, me rattachant à l’école libérale française, il était nécessaire de confronter la théorie de cette école avec la réalité des faits.

Fermer les frontières : une mauvaise solution

Ce qui m’amène à plusieurs conclusions qui ne plairont pas à ceux qui prônent la fermeture des frontières. Il serait absurde de rétablir les contrôles aux frontières entre les pays européens, absurdes parce qu’inutiles. Les clandestins trouveraient quand même des façons de passer, alors que cela nuirait fortement aux honnêtes gens. La surveillance est à faire aux frontières extérieures de l’Europe, et elle se révèle d’ailleurs souvent efficace.

De même, bâtir des murs n’est nullement une solution. Le phénomène migratoire est une conjonction entre des zones répulsives et des zones attractives. Pour résoudre le phénomène, il faut limiter la répulsivité et l’attractivité des zones. En bâtissant des murs, on perturbe les flux, mais on ne les supprime pas. Entre l’Afrique et l’Europe, nous avons un grand mur, naturel, la mer Méditerranée. Ce mur n’empêche nullement des êtres humains de risquer leur vie pour le franchir, et parfois d’y mourir. En revanche, ces personnes tentent de se rendre en Europe (zone attractive), mais pas ailleurs en Afrique (zone répulsive).

L’échec de l’État providence

Le phénomène migratoire ne peut pas se concilier avec l’État providence. L’Europe a d’ailleurs une grande part de responsabilité dans cette crise. Ce sont ses pays qui ont déstabilisé le Proche-Orient (Irak, Syrie, Libye…) engendrant les phénomènes de départ. C’est l’Europe aussi qui fait appel aux migrants (plusieurs documents de l’UE appellent à intensifier les flux), mais qui n’a rien prévu pour les recevoir, les obligeant à s’entasser dans des camps indignes de notre civilisation. On camoufle les souffrances des migrants, tout autant que celles des populations d’Europe qui, à la moindre récrimination sur les problèmes engendrés par ces phénomènes, sont accusées des pires maux et des pires pensées.

La théorie libérale se révèle une fois encore la solution opportune à cette crise. Il est nécessaire de libéraliser les migrations, c’est-à-dire non pas d’ouvrir toutes les fenêtres et les portes, mais retirer à l’État le monopole de la gestion migratoire. La liberté des échanges suppose que les deux parties respectent les termes du contrat, et donc que les populations qui désirent venir soient respectueuses des lois et des coutumes. On assiste aujourd’hui à des États qui imposent aux communes l’accueil des migrants, forçant certaines communes rurales à loger un grand nombre d’entre eux, alors qu’il n’y a ni travail à leur proposer, ni structures éducatives adéquates. Cette politique socialiste est totalement absurde. Avec la liberté des échanges, un ordre spontané se met en place, les migrants ne se rendant pas là où ils n’ont pas d’avenir possible.

Migration et criminalité

Nous abordons un sujet essentiel qui est le rapport entre migration et criminalité. Le criminologue Xavier Raufer démontre le rôle des mafias et leur enrichissement grâce à leur fonction de passeur. La mafia albanaise est très active dans ce dossier, mafia qui a pu se développer grâce à la complicité passive de l’Union européenne dans le détachement du Kosovo de la Serbie. Les mafias sont présentes en Libye, pour attirer les migrants et organiser les transports jusqu’en Europe. Leur chiffre d’affaires monte à plusieurs millions d’euros. C’est une traite humaine qui fait honte à l’Europe.

Par ce livre, nous voulons donner l’essentiel pour comprendre ce sujet délicat. Il est en tout cas urgent d’agir pour arrêter les trafics d’humains et pour cesser la déstabilisation de la Syrie et de l’Irak, sinon ce sera l’Europe qui sera ébranlée à son tour.

12 janvier 2016 , Jean-Baptiste Noé

Source : contrepoints.org

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