Face à l'urgence de la crise migratoire, la Commission européenne a une nouvelle fois exhorté la Grèce à améliorer les conditions d'accueil des réfugiés, avec l'objectif de pouvoir lui renvoyer des migrants afin de soulager d'autres Etats membres débordés.
Dans le même temps, Bruxelles a rappelé avec insistance aux 28 pays de l'Union européenne leurs obligations en matière de répartition des réfugiés, le processus évoluant avec une lenteur qui irrite l'exécutif européen.
Ramener la Grèce dans le giron du règlement de Dublin qui oblige l'Etat membre par lequel un réfugié est entré dans l'UE à examiner sa demande d'asile : telle est la dernière recommandation de la Commission pour mettre un peu d'ordre dans la gestion de la pire crise migratoire depuis 1945.
Depuis 2010-2011, les pays de l'Union européenne n'ont plus la possibilité de renvoyer des migrants vers la Grèce en application de la règle de la première entrée, à la suite de carences mises en évidence par la justice européenne dans le traitement des demandes d'asile.
La Grèce, qui se débat pour sortir d'une crise financière majeure, doit encore améliorer certains domaines comme "les capacités et les conditions d'accueil, l'accès à la procédure de demande d'asile, (la possibilité de faire) appel, et l'aide juridique", souligne la Commission.
Des "mesures urgentes" doivent être prises "dans l'objectif d'une possible reprise de certains transfèrements", préconise la Commission, qui a pourtant annoncé son intention de réformer le règlement de Dublin" qui a, de fait, explosé devant l'afflux de plus d'un million de migrants en 2015.
"Message clair et fort"
"Dublin n'est pas mort. Nous le maintenons en vie (...)", s'est défendu Dimitris Avramopoulos, commissaire européen chargé des migrations, disant en outre avoir adressé par écrit aux ministres de l'Intérieur des autres Etats membres "un message clair et fort pour leur rappeler qu'ils sont liés par les décisions sur la répartition des réfugiés, qui doivent être appliquées immédiatement".
L'été dernier, les 28 s'étaient mis d'accord, très laborieusement, sur deux mécanismes de répartition au sein de l'UE pour l'accueil de 160.000 personnes arrivées en Grèce et en Italie.
Mais il ressort du dernier recensement de la Commission que seuls 218 demandeurs d'asile ont été "relocalisés" à partir de la Grèce et 279 à partir de l'Italie. La Grèce a amélioré ses capacités d'enregistrement et ses infrastructures pour loger et transférer les migrants, même si plus de 12.300 places manquent encore sur les 50.000 promises par Athènes en octobre, note cependant la Commission.
Début février, Bruxelles avait déjà critiqué Athènes pour les défaillances à sa frontière avec la Turquie, la frontière extérieure de l'UE, et fait des recommandations qui doivent être adoptées vendredi par le Conseil européen (cette instance représente les Etats membres).
Si la Grèce ne les suit pas, la Commission pourra activer après trois mois une mesure inédite, la prolongation jusqu'à deux ans de la période pendant laquelle des Etats peuvent rétablir des contrôles frontaliers à l'intérieur de l'espace Schengen de libre circulation.
En janvier, près de huit migrants sur 10 ont eu leurs empreintes enregistrées dès leur arrivée dans ce pays, contre moins d'un sur 10 en septembre. Seul un centre d'enregistrement ("hotspot") sur les cinq prévus y est opérationnel mais une fois en place, ils doivent pouvoir enregistrer jusqu'à 11.000 personnes par jour, soit plus que la moyenne quotidienne constatée en janvier.
Mais le gouvernement grec doit également composer avec l'hostilité des populations locales : un millier de manifestants, dont des commerçants et des professionnels du tourisme, se sont rassemblés mercredi à Kos contre le "hotspot" qui doit être installé sur cette île touristique.
En Italie, la lenteur du processus de relocalisation est liée au faible nombre des migrants éligibles à l'asile.
La Commission européenne a par ailleurs proposé de suspendre pendant un an 30% des relocalisations prévues en Autriche, en raison de l'afflux de migrants dans ce pays.
L'institution attend encore beaucoup de la Turquie, qu'elle considère comme un partenaire clé pour endiguer les flux de nouveaux migrants.
"Si la Turquie ne s'engage pas (...), il sera très difficile de gérer la situation", a estimé M. Avramopoulos.
10 fév 2016,Marine LAOUCHEZ
Source : AFP