La chancelière allemande Angela Merkel a reçu mercredi 120 élus, ministres et responsables d'associations pour un sommet sur l'intégration, question qui provoque un débat virulent dans le pays.
Les participants à cette réunion à la chancellerie ont adopté un plan d'action pour mieux promouvoir l'intégration des 15,6 millions d'étrangers ou de personnes d'origine étrangère vivants en Allemagne.
Parmi les mesures figurent notamment une meilleure maîtrise de la langue allemande, cheval de bataille de la chancelière qui y voit la "clé de l'intégration". Le gouvernement doit débloquer de 400 millions d'euros d'ici 2014 pour favoriser l'apprentissage de l'allemand par les enfants d'immigrés.
L'école maternelle est peu développée en Allemagne et les enfants arrivent souvent en primaire sans avoir été scolarisés.
"Quand on ne parle pas bien la langue, on a peu de chances une fois arrivé sur le marché du travail", a souligné Mme Merkel au cours d'une conférence de presse après le sommet.
Le gouvernement entend également augmenter le nombre d'immigrés dans les services publics, notamment dans la police.
"Il ne suffit pas d'attendre les candidatures, il faut que nous allions là où se trouvent les enfants immigrés, dans les écoles", a martelé le ministre de l'Intérieur, Thomas de Maizière.
Auparavant la chancelière avait réaffirmé que l'intégration, absente du débat politique pendant plusieurs années, était désormais une des ses priorités. Il y a "un très grand besoin de rattrapage", a-t-elle souligné.
Le débat fait rage en Allemagne depuis la publication par un responsable de la Banque centrale, Thilo Sarrazin, qui a depuis démissionné, d'un pamphlet affirmant par exemple que le pays "s'abrutit" sous le poids des immigrés musulmans.
"L'Allemagne court à sa perte", s'est déjà vendu à 1,1 million d'exemplaires. Il dénonce en particulier les faibles qualifications professionnelles des 4 millions de musulmans alors que l'Allemagne, pays vieillissant, aurait grand besoin de main-d'oeuvre étrangère qualifiée.
La classe politique a condamné cet ouvrage, mais une majorité d'Allemands approuvent les thèses de M. Sarrazin.
Mme Merkel a levé un tabou en affirmant que le modèle multiculturel dans lequel cohabiteraient harmonieusement différentes cultures avait "complètement échoué".
Certains dénoncent cependant une stigmatisation des étrangers, en particulier des Turcs, dans ce débat.
"Le débat sur l'intégration s'est transformé en débat sur la désintégration dont l'objectif n'est plus le lien social mais l'exclusion, le découragement et la désagrégation", commentait mercredi un éditorialiste du quotidien Berliner Zeitung.
L'Allemagne, dont un habitant sur cinq est pourtant soit étranger soit d'origine étrangère, a toujours du mal à se voir comme un pays d'immigration.
En 2000, elle avait franchi une étape historique en renforçant considérablement le droit du sol, qui accorde la nationalité allemande aux enfants nés en Allemagne de parents étrangers.
Dans les rangs de l'opposition de gauche, des critiques se sont également élevées contre le fait même d'organiser un tel sommet, qui en est à sa quatrième édition, accusé de constituer "un alibi" pour le gouvernement conservateur-libéral d'Angela Merkel.
Pour le maire social-démocrate (SPD, opposition) de Berlin, Klaus Wowereit, ce sommet ne sert qu'à faire "de belles photos de presse arrangées". Car parallèlement, le gouvernement réduit les budgets des services sociaux urbains et de l'éducation interculturelle, dénonce-t-il.
Source : AFP