mercredi 3 juillet 2024 18:23

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Toute l'histoire des anciens mineurs marocains enfin révélée dans un livre

L'Association des anciens mineurs marocains du Nord - Pas-de-Calais (AMMN) vient de publier un livre précieux : « De la tête baissée à la conquête de la dignité ». Passionnant et édifiant !

Dire que leur histoire aurait pu sombrer dans l'oubli le plus total ! C'eût été une injustice de plus. Mais en publiant un livre consacré à leur parcours, à leur engagement au sein de l'AMMN, les anciens mineurs marocains ont remporté un nouveau combat. De la tête baissée à la conquête de la dignité, écrit grâce à la collaboration de deux chercheurs de l'IFAR(1), Saïd Bouamama et Jessy Cormont, raconte le parcours de ces jeunes hommes que les Houillères sont allés recruter au Maroc, dans les années 1960-70. « Ils nous ont choisis parce qu'on était jeunes, pas alphabétisés, on ne parlait pas un mot de français », témoigne Lacen Azeroual. Pour être embauché, il fallait par contre avoir une bonne constitution. Alignés devant les recruteurs des Houillères, les candidats, torse nu, recevaient un coup de tampon sur la poitrine qui décidait de leur destin. Tampon rouge : recalé. Tampon vert : bon pour le service.

À leur arrivée dans le bassin minier, bien des concepts leur étaient étrangers. Droits des travailleurs, syndicats, grèves... Ils n'en avaient jamais entendu parler. Comme l'explique Jessy Cormont, « tout était organisé pour que les mineurs ne puissent pas défendre leurs droits : l'organisation des baraquements, qui les coupait des quartiers des mineurs français, la traque aux mineurs qui voulaient se défendre... » Car au moindre faux pas, c'était la porte. « Ils avaient des contrats à durée limitée, ils subissaient des intimidations », explique Saïd Bouamama.

Arguments à l'appui, le sociologue dénonce l'existence d'un système « entièrement construit pour que les mineurs marocains ne se révoltent pas face aux injustices. Ils ont vécu un traitement colonial sur le territoire français. On les a considérés comme une force de travail brute, sans odeur, sans saveur, sans famille, sans enfants ».

Le livre raconte comment, petit à petit, est venue la prise de conscience. Et le début d'un long et patient combat pour l'égalité des droits. La grève de 1980, qui leur permet d'obtenir enfin le statut de mineur. La grande grève de 1987, à la fermeture des Houillères. Puis, l'apparition de l'AMMN, fondée il y a vingt ans par une poignée de bénévoles admirables d'abnégation. L'ouvrage décrit avec précision et méthode toute cette aventure humaine. Les auteurs ont inclu de nombreux témoignages d'anciens mineurs, et ont eu à coeur de restituer le plus fidèlement possible leurs paroles. Des mots de vérité après un long silence. « Quand on croise leurs enfants, on découvre qu'ils ne savent rien de cette histoire. Ils ne se sont jamais confiés, car ils voulaient laisser leurs enfants tranquilles avec ça. » Que les jeunes générations lisent cet ouvrage, et elles découvriront un pan fondamental de leur héritage. En vérité, le livre est à mettre entre toutes les mains. Formidable message d'espoir, il témoigne qu'à force de courage, de résistance, de solidarité, on déplace des montagnes ! •

06.11.2010, 05:07

Source : La Voix du Nord

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