S'attachant désormais à décrire les conditions de vie aussi bien que la qualité de vie, l'Insee publie mercredi son étude "France, portrait social". Parmi les enseignements cette année: les enfants d'immigrés accèdent moins facilement à l'emploi que les autres, le logement coute plus cher aux pauvres qu'aux autres et la facture énergétique a augmenté ces dix dernières années en raison de l'étalement urbain.
Comme chaque année, l'Insee publie, mercredi, son étude "France, portrait social", un large panorama sur la démographie, les conditions de vie, l'économie des foyers français. Nouveauté pour cette édition: la prise en compte de critères "qualitatifs", conséquence des recommandations de la commission Joseph Stiglitz. L'Insee établit que le risque d'une "mauvaise qualité de vie" est de 14% dans l'ensemble de la population. Et, sans surprise, les 25% les plus pauvres de la population ont un risque 53% supérieur aux autres de voir leur qualité de vie se dégrader. Le risque pour les familles monoparentales d'avoir une mauvaise qualité de vie est 40% supérieur à la moyenne. Plus inquiétant encore, 22 % des adultes ont été une fois entre 2004 et 2007 "pauvres en condition de vie". Néanmoins, il s'agit d'un phénomène transitoire puisque seulement 4 % des personnes l'ont été quatre ans d'affilée.
Des inégalités face à l'emploi pour les enfants d'immigrés
La deuxième génération d'immigrés maghrébins a beaucoup de difficultés à trouver un emploi et ce phénomène ne s'explique pas seulement par les différences de diplômes ou de situation familiale, écrit l'Insee. En moyenne, entre 2005 et 2009, 86% des hommes français âgés de 16 à 65 ans ont un emploi quand leurs deux parents sont Français de naissance. Ils ne sont que 65% quand au moins un de leurs parents est immigré du Maghreb, soit un écart de 21 points. L'écart est de 18 points pour les femmes (75% et 56% des Françaises en emploi). Pour les Français dont les parents sont originaires d'Europe de l'Est, du Nord ou du Sud, l'écart n'excède jamais six points.
"La discrimination à l'embauche à l'encontre des descendants d'immigrés originaires du Maghreb, dont l'existence a été mise en évidence par les études de testing, est une explication plausible pour rendre compte d'une partie des écarts inexpliqués", écrivent les chercheurs. Ils ajoutent que d'autres caractéristiques qui ne sont pas observées par la statistique peuvent avoir une incidence, citant l'accès à un réseau social, donc à des offres d'emploi, et la volonté d'accéder à un emploi - faible, pour des raisons culturelles, chez les femmes maghrébines -. L'Insee constate également que l'écart d'emploi entre descendants de Français et de Maghrébins est le plus fort pour les hommes peu ou pas diplômés. A partir du niveau Bac +3, l'écart est beaucoup plus réduit et s'explique systématiquement. L'Insee ne se prononce pas sur les inégalités vécues par les enfants d'immigrés d'origine sub-saharienne ou asiatique, ses échantillons étant trop faibles.
Le logement des pauvres coute plus cher
L'Insee s'intéresse également aux inégalités face au coût du logement. En 2006, près de 39% du budget des ménages à faibles ressources était absorbé par les loyers, les charges, les remboursements des emprunts, etc. Alors que la moyenne nationale se situait à 27%. Il faut dire que les loyers des plus modestes ont augmenté, entre 1996 et 2006 de 42%, quand, pour les reste des ménages, la hausse n'était que de 28%. Certes, ajoute l'Institut, les logements des plus pauvres ont connu de nombreuses améliorations sur cette période (surface, chauffage, confort sanitaire, etc.), mais cette amélioration de la qualité des appartements et maisons ne participe qu'à hauteur d'un cinquième à la hausse des loyers. L'Insee explique que la raison principale serait un dérapage des loyers, tout simplement.
La facture énergétique des ménages plus chère en raison de l'étalement urbain
En 2006, les dépenses d'énergie (carburant et énergie pour le logement) représentaient 8,4% du budget des ménages. "En 20 ans, la part de l'énergie dans le budget des ménages (transports et logement) est restée globalement stable. Pourtant l'énergie est devenue relativement moins chère sur cette période", note l'Insee. Principale explication: la localisation et la surface des logements peuvent faire grimper la facture. "Les appareils électriques et les véhicules se sont multipliés et les ménages vivent plus loin des villes-centres dans des logements plus grands", ajoutent les auteurs de l'enquête. Si les ménages habitaient le même type de logement en terme de surface et d'éloignement des villes qu'il y a 20 ans, leur budget dédié à l'énergie aurait baissé de 10%.
Source : JDD