Alors que les questions liées à la visibilité de l'islam en France ne cessent de monopoliser l'actualité, le Parti socialiste, souvent embarrassé par ces débats, a pris position sur les prières organisées sur la chaussée, rue Myrrha, dans le quartier de la Goutte-d'Or à Paris.
Le porte-parole du Parti socialiste, Benoît Hamon, a jugé, mercredi 15 décembre sur RMC et BFM TV, que ces prières, organisées dans la rue faute de lieu de culte, constituent "des situations qui ne sont pas tolérables beaucoup plus longtemps. On a une situation de tension avec les riverains et il faut trouver des solutions", a-t-il ajouté. Pour lui, "il faut arriver à une discussion, à une négociation avec un calendrier, un échéancier pour trouver des solutions en termes d'espace dans lesquels les fidèles peuvent exercer leur culte" mais "pour libérer aussi l'espace public".
Les déclarations de Benoît Hamon surviennent après une série de polémiques, de l'affaire de la conductrice voilée de Nantes à celle de la viande hallal dans certains restaurants Quick, sur lesquelles le PS, déchiré entre défense des minorités et conviction laïque, a souvent du mal à trouver une position claire. Le parti s'est ainsi divisé lors du vote de la loi sur l'interdiction du niqab dans l'espace public. Depuis, l'affaire des prières rue Myrrha a pris de l'ampleur, Marine Le Pen l'ayant assimilée à une "occupation" du pays. La phrase, qui a provoqué un tollé général dans la classe politique, est approuvée, selon une enquête IFOP pour France-Soir, par 39 % des sondés, et 54 % des sympathisants UMP.
Pour Benoît Hamon, "il n'y a aucune raison que la laïcité ne soit pas garantie" en France. Revenant sur les prières dans la rue, il estime qu'il faut que "les choses soient claires pour tout le monde, claires pour les riverains, claires pour les fidèles".
Dans un chat au Monde.fr, Ségolène Royal, candidate aux primaires de son parti pour 2012, juge quant à elle que "la laïcité telle qu'elle a été inscrite dans la Constitution s'accompagne de la liberté d'exercice du culte. Par conséquent, les convictions religieuses doivent pouvoir s'exercer dignement dans des lieux suffisamment grands".
VALLS SE POSE EN ADEPTE DU "PARLER-VRAI" SUR L'IMMIGRATION
Un autre socialiste a pris position sur les questions, cette fois, d'immigration. Le député-maire d'Evry, Manuel Valls, également candidat aux primaires du parti, a expliqué à Canal Jimmy que s'il était président, il instaurerait un secrétariat d'Etat à l'immigration. Cette proposition, relevée par L'Express, retient l'attention, car le PS n'a eu de cesse, jusqu'à sa suppression, de dénoncer la mise en place par Nicolas Sarkozy d'un ministère de l'immigration et de l'identité nationale.
Manuel Valls a cependant toujours eu une position en marge de celle de son parti sur l'immigration. En 2007, il avait choqué à gauche en publiant dans Libération une tribune posant les bases d'une "politique d'immigration de gauche". Le député y demandait à son parti de "sortir d'un discours dogmatique et compassionnel". Il proposait d'améliorer les conditions d'accueil des étrangers, mais aussi de réfléchir à des quotas d'immigration et de durcir la lutte contre l'immigration clandestine.
Deux ans plus tard, en 2009, alors qu'Eric Besson lance son débat sur l'identité nationale, le maire d'Evry estime que le PS ne doit pas l'esquiver, mais au contraire y participer, et dénonce une gauche "complexée" sur ces questions.
LE PS ENCORE FLOU
De fait, le bagage théorique du PS sur les questions liées à l'islam en France et à l'immigration est limité : sur le site du parti, l'immigration est résumée en une vidéo de Sandrine Mazetier, secrétaire nationale chargée de la question, et à deux articles, l'un sur le droit de vote des étrangers aux élections municipales et l'autre sur la régularisation des sans-papiers.
La convention du parti sur l'international a évoqué la nécessité de refonder une politique des flux migratoires, en l'élargissant à l'Europe "qui aura besoin de l'immigration", mais d'une immigration "régulée, maîtrisée, concertée". Quant à l'islam, la convention dénonce "la vision trop souvent portée dans l'Hexagone sur l'islam, qui sert à justifier un discours symétrique de repli identitaire", mais ne fait pas de propositions plus précises.
Or l'UMP a bien compris qu'elle pouvait tirer avantage de ce flou, et cherche par ailleurs à stabiliser sa cote dans l'électorat proche de l'extrême droite par des propositions susceptibles de lui plaire. La proposition de Jean-François Copé, le nouveau patron du parti présidentiel, de relancer le débat sur l'identité nationale, semble dessiner cette stratégie.
Source : Le Monde