samedi 23 novembre 2024 11:25

La Grèce veut barricader sa frontière avec la Turquie

Confronté à un afflux massif de clandestins, le gouvernement va édifier un mur de barbelés long de 12,5 km dans la région du fleuve Evros.

Après avoir tout essayé pour limiter le flux d'immigrés clandestins à ses frontières maritimes et terrestres, la Grèce passe à la manière forte et annonce vouloir construire une clôture pour s'en protéger. Les îles étant surveillées depuis quelques mois par la police européenne aux frontières, Frontex, les migrants en quête d'Europe passent de plus en plus par le nord du pays, dans la région du fleuve Evros, située à deux heures d'Istanbul. C'est le long de cette frontière terrestre, qui s'étend sur 12,5 km entre les villes d'Orestiasa et de Vissa, que le gouvernement veut ériger un mur de barbelés. Il sera équipé de caméras thermiques qui assureront la surveillance 24 heures sur 24, ainsi que de capteurs ultrasensibles pour détecter toute arrivée.

La Commission européenne reste sceptique sur l'efficacité du projet et considère qu'il s'agit de «mesures à court terme qui ne permettent pas de s'attaquer de manière structurelle à la question de l'immigration clandestine». Il n'empêche, le ministre de la Protection civile, Chritsos Papoutsis, est bien décidé à aller au bout. Il dénonce «l'hypocrisie de ceux qui reprochent à la Grèce de ne pas surveiller ses frontières selon les critères de Schengen et qui la jugent alors qu'elle veut logiquement protéger ses frontières» et affirme que le mur sera prêt en mars prochain. Selon les chiffres officiels, entre 200 et 300 personnes tentent chaque jour d'arriver en Grèce. Plus de 26% sont d'origine africaine et 18% viennent du Pakistan.

Plus d'un million d'immigrés

Mais selon Ioannis Stefanakis, un habitant de Vissa, le mur n'est pas une solution. «Nous ne voulons pas devenir la frontière américano-mexicaine, s'emporte-t-il. Une fois bloqués par le mur, les migrants viendront par le fleuve. Il n'y a que cinq minutes de traversée en barque et les migrants payeront le même prix: 400 euros.» En 2009, sur les 126.145 clandestins arrivés en Grèce, 43.500 ont été arrêtés sur les bords de l'Evros, en particulier dans la ville de Vyssa. Le centre de rétention de la région est totalement surchargé. Des hommes, femmes et enfants sont accueillis dans des conditions déplorables, avant d'être relâchés avec pour seul viatique un sac de couchage et un avis de quitter le territoire d'ici à un mois. La grande majorité se retrouve à Athènes. Au total, il y aurait dans le pays plus d'un million et demi d'immigrés, sur 11 millions d'habitants.

De nombreux observateurs considèrent que la Grèce, qui accueille 90% de l'immigration clandestine européenne depuis la fermeture des frontières espagnoles et italiennes, a raison d'opter pour cette nouvelle stratégie. Elle permettra de faire pression sur l'Union européenne «qui n'a pas pour le moment de politique migratoire», souligne Elena Panariti, députée du Pasok. «L'aide technique de Frontex ne suffit pas. Il y a urgence, nous n'avons plus la capacité d'accueillir ces migrants. Nous sommes déjà au-delà de nos limites, affirme Elena Panariti. C'est donc un problème local. Et si elle veut, l'Union européenne pourra s'inspirer de l'exemple grec.» Conscient de la nécessité de faire face à cette nouvelle donne de la société grecque, le gouvernement a inscrit la question de la politique migratoire à l'ordre des débats de l'Assemblée. Un nouveau projet de loi sera soumis au vote du Parlement la semaine prochaine.

Source : Le Figaro

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