A l’appel de «Respect Magazine», de nombreuses personnalités dénoncent les attentats contre les chrétiens d’Orient.
«La décision de lancer cet appel est née d’une réaction spontanée», raconte Marc Cheb Sun. Au lendemain de l’attentat contre l’église copte d’Alexandrie, le rédacteur en chef de Respect Magazine se promène sur les forums et autres blogs. «De très nombreux musulmans - de confession ou de culture - y exprimaient le dégoût de cette violence. Ils se disaient extrêmement choqués par ce massacre. Et par le fait que, depuis des années, ces actes sont commis au nom de l’islam», rapporte-t-il.
Avec Ousmane Ndiaye, collaborateur de Respect Magazine, l’idée de lancer cet appel, que publie aujourd’hui Libération, germe. «On a voulu rendre visibles et audibles ces sentiments largement partagés par ces musulmans, mais qui manquaient à notre sens de visibilité, notamment pour les non-musulmans qui ne vont pas sur ces sites ou n’auraient pas entendu les condamnations des responsables musulmans», rappelle Marc Cheb Sun. Le 1er janvier, quelques heures après l’attentat d’Alexandrie, Mohammed Moussaoui, le président du Conseil français du culte musulman, a effectivement condamné cet attentat «abject».
«Être libres». Coïncidence, alors que les deux hommes sont en train de travailler sur le texte de l’appel, Bernard Carayon, député UMP du Tarn, appelle «les Français musulmans» à dénoncer les «massacres de masse» contre les chrétiens d’Orient et à «ne plus offrir leur solidarité silencieuse à ces atrocités». Marc Cheb Sun et Ousmane Ndiaye n’hésitent pas. «Il n’est pas question de répondre à ceux qui exigent des musulmans une réaction face aux actes terroristes. Les diverses associations représentatives du culte musulman ou des musulmans de France n’ont d’ailleurs pas attendu d’y être assignées pour condamner, avec la plus grande fermeté, chacun des attentats commis contre les chrétiens d’Orient», rappelle le premier. Les deux journalistes décident donc de maintenir leur appel. «Les propos, aussi lamentables soient-ils, d’un député, ou de quiconque qui exigerait notre prise de parole, ne doivent en rien influer sur notre capacité à agir en êtres libres, et donc à nous positionner. Ils ne doivent certes pas nous obliger à parler, et ils n’ont eu aucune influence sur notre décision. Ils ne doivent pas non plus impulser un silence. Dans le contexte, de tels propos n’ont simplement aucune importance», rappelle Marc Cheb Sun.
«Solidarité». Soixante-dix personnalités ont déjà signé ce texte intitulé «L’islam bafoué par les terroristes». Parmi elles, des musulmans pratiquants comme Ghaleb Bencheikh, des musulmans «sociologiques» telle Naïma M’Faddel, voire des musulmans athées à l’instar de Magyd Cherfi (lire ci-contre). Des non-musulmans comme Anne Esambert, fonctionnaire, se sont également associés à cet appel. «J’ai signé par solidarité avec ces musulmans dont on a tendance à penser qu’ils acquiescent à ces massacres par leur silence, alors que c’est totalement faux pour les fréquenter et les connaître», explique-t-elle.
Le texte est en ligne depuis ce matin sur le site de Respect Magazine. Avec Ousmane Ndiaye, Marc Cheb Sun envisage également un rassemblement silencieux : «On appelle les gens de toutes origines et de toutes confessions à nous rejoindre.»
Source : Libération.fr