La rencontre de Londres a permis de faire connaissance avec les potentialités marocaines de GB, d'identifier leurs champs de manœuvre et d'évaluer leur disposition à participer au développement du Maroc.
LE MATIN : Après la rencontre qui a eu lieu à Londres avec les investisseurs potentiels marocains établis en Grande-Bretagne, quelles sont les conclusions que vous avez tirées ?
MOHAMED AMEUR : Vous savez, ce qui caractérise la communauté marocaine en Grande-Bretagne, c'est, malgré son nombre réduit (entre 40 et 50 mille ressortissants, en comparaison avec la France, l'Espagne, l'Allemagne….), la présence d'une grande élite de cadres et de potentialités qui travaillent dans des secteurs très importants, dont celui de la finance, ou au sein d'institutions transcontinentales. Cette rencontre est la première d'une série d'autres que nous souhaitons durables et soutenues, pour que nous puissions examiner ensemble les possibilités et les moyens tangibles qui garantiraient leur participation au développement et aux chantiers initiés dans leur pays. Aussi, les personnes qui sont désireuses d'investir au Maroc ont eu l'occasion d'en savoir un peu plus sur les formalités, les moyens de financement et les opportunités d'investissement qui existent au Maroc. Les autres, qui ne vont pas forcément investir, peuvent également prendre part à ce processus d'une manière ou d'une autre. Cette rencontre avait donc pour objectif d'asseoir une méthodologie de travail opérationnelle pour faire participer un plus grand nombre de potentialités dans le développement du Maroc.
Est-ce que vous disposez de données chiffrées sur ces potentialités ?
La rencontre de Londres nous a permis de faire connaissance avec les potentialités marocaines de GB, d'identifier leurs champs de manœuvre et d'évaluer leur disposition à participer au développement du Maroc.
Nous avons déjà effectué ce genre d'opération dans d'autres pays. Nous avons commencé par la création de réseaux de potentialités marocaines qui travaillent dans le cadre d'un réseau et qui ont une force de propositions assez soutenue. D'autres initiatives s'en suivront. Elles visent à créer un cadre souple au sein duquel ces potentialités auront la possibilité de se rencontrer en vue de devenir des partenaires à part entière du Maroc et des interlocuteurs avec lesquels nous pourrons débattre de toutes les questions qui concernent la communauté marocaine à l'étranger, ainsi que sa participation dans les secteurs de développement.
Aussi bien le Maroc que les MRE ont changé. Dans quel sens ce changement s'est-il opéré ?
L'évaluation que nous avons fait des investissements des Marocains résidant à l'étranger nous a permis de tirer quelques conclusions. Premièrement, les investissements de la première génération dans les années 60, 70, 90 et même aujourd'hui, s'orientent principalement vers le secteur immobilier. Il s'agit surtout des MRE d'origine rurale qui ont pu grâce à l'immigration construire des logements dans leurs campagnes, villes ou dans les villes voisines.
On remarque aujourd'hui que la « révolution » immobilière qu'à connue le Maroc dans certaines zones rurales durant ces dernières années est due au rôle des MRE dans ce secteur (la région du Rif, du Souss…). La deuxième conclusion est que, vers la fin des années 90, sont apparues de nouvelles initiatives dans le secteur de l'investissement d'entreprise par la nouvelle génération, qui est constituée de cadres et de potentialités ayant acquis des compétences dans leurs pays d'accueil. Cette génération a donc commencé à investir dans le domaine du tourisme rural, dans le secteur des technologies modernes, dans l'agriculture comme c'est le cas dans la région de Tadla et dans les oasis. Nous voulons que ces investissements dans les secteurs productifs aillent loin.
Nous désirons également que l'orientation générale dans le pays soit celle des investissements dans les secteurs de l'avenir, qui participent à la création d'emploi et assurent des rentrées d'argent importantes au pays. Aujourd'hui, les conditions au Maroc sont propices pour ce genre d'investissement grâce aux efforts déployés dans différents secteurs, de planification, des politiques sectorielles et des programmes de développement… Aujourd'hui le secteur agricole présente d'importantes opportunités. Notre but en tant que gouvernement est d'encourager, d'encadrer et d'orienter les investissements des MRE dans le sens des nouveaux secteurs.
Comment comptez-vous répondre aux attentes de cette communauté d'investisseurs ?
Lors de l'étude que nous avons effectuée à propos des investissements des MRE, nous avons remarqué que les problèmes qu'ils rencontrent freinent leur volonté d'investir. Le premier problème concerne la multiplicité des institutions qui interviennent dans le processus d'investissement. Malgré les efforts de notre pays durant ces dernières années (création de centres régionaux d'investissement), les investisseurs potentiels cherchent encore un interlocuteur unique parce qu'ils n'ont ni le temps ni la connaissance des procédures administratives. Ils ont besoin d'être orientés et accompagnés.
C'est dans ce sens que nous avons tenté de dialoguer avec les CRI pour créer un guichet dédié aux MRE pour les accompagner. Mais nous n'avons pas réussi à créer un guichet unique même pour les grands investissements. Les MRE ont besoin d'un encadrement spécifique. Raison pour laquelle nous avons pensé, avec les banques marocaines, qui se chargeront de la gestion de la caisse de développement des investissements des Marocains et de certaines banques, à mettre en place des moyens de soutien et d'accompagnement de ces investisseurs en vu de leur faciliter les tâches dans toutes les démarches de la constitution du dossier d'investissement…
Est-ce que ces investisseurs connaissent assez les opportunités que leur offre le Maroc ?
Justement, parmi les problèmes auxquels nous devons faire attention est le manque de connaissance et de données concernant les opportunités d'investissement au Maroc. Nous sommes face à des personnes qui ont essayé d'investir et qui ont rencontré des problèmes et d'autres qui ont l'intention d'investir mais qui craignent la complexité des procédures. Néanmoins, parmi tous ceux que nous avons rencontrés, je suis sûr qu'il existe un certain nombre de potentialités, en sommeil, ce qui est très important. Nous ne devons pas attendre qu'ils manifestent leur désir d'investir. Seule une minorité a le courage d'affronter les problèmes de l'administration.
La majorité regarde de loin parce que n'ayant pas assez d'informations ni le désir d'investir au Maroc. C'est pour cela que nous avons entrepris d'aller vers eux et de les sensibiliser aux opportunités que leur offre le Maroc.
De quelle manière comptez-vous vous y prendre concrètement ?
L'investisseur potentiel moyen a besoin d'être accompagné. Nous avons donc pensé, en concertation avec les administrations concernées, à ce processus d'accompagnement à partir de l'identification du projet, de la mobilisation du potentiel, de la présentation des opportunités d'investissement, du montage du projet, du montage financier… C'est un travail qui demande la conjugaison des efforts de plusieurs administrations. Nous avons un rôle de sensibilisation. Nous sommes un mécanisme de mise en réseau entre l'offre et la demande et veillons à la création d'initiatives.
L'approche sectorielle du ministère des MRE
L'année 2011 s'annonce riche en rencontres pour le ministre Mohamed Ameur qui développe de grands projets avec les potentialités sectorielles. Dans les grandes villes, comme en France qui compte d'innombrables potentialités, le MCCME procédera à une approche thématique. Trois initiatives sont prévues en France : la première concernera les Marocains qui travaillent dans le secteur médical en vue de la constitution d'un réseau de médecins. Avec un certain nombre d'associations, un projet est en cours de montage. Il sera présenté au premier congrès des médecins. Une autre rencontre est prévue avec les potentialités qui œuvrent dans le domaine juridique. Le ministère prépare le premier congrès des femmes et des hommes de droit de la communauté des MRE. A signaler que le MCCME a instauré une assistance juridique et judiciaire disponible dans les institutions consulaires et dans les ambassades pour présenter un soutien à ceux qui en ont besoin. La troisième initiative concerne les élus d'origine marocaine et les élus amis du Maroc.
A l'ordre du jour, un congrès qui réunira ces élus et leurs homologues du Maroc pour étudier les moyens de développement et de coopération dans le domaine de la décentralisation et du développement local.
31/1/2011, Kenza Alaoui
Source : Le Matin