samedi 23 novembre 2024 14:11

France/Immigration : la bataille sera juridique

Le ministre de l'Intérieur et de l'Immigration, Claude Guéant, a visité, vendredi, les locaux du Centre de coopération policière et douanière franco-italien, à Vintimille. Crédits photo : MARTIN BUREAU/AFP

«Ce n'est pas un raz-de-marée», affirme Claude Guéant, mais il y a bien une «poussée». Et une sévère. Vendredi, à Vintimille, au Centre de coopération policière et douanière franco-italien, le nouveau ministre de l'Intérieur, visiblement heureux de retrouver «ses» policiers et gendarmes, a tenu à prendre lui-même le pouls du flux migratoire depuis qu'ont éclaté les révolutions arabes. Les chiffres égrenés par les hommes de cette brigade mixte d'une cinquantaine d'agents bilingues attestent qu'une brèche vient de s'ouvrir au Sud: 6 500 clandestins débarqués sur l'île italienne de Lampedusa en un mois, soit dix fois le rythme habituel. Et même plus d'un millier les trois premiers jours de mars! La France en subit le contrecoup direct : 436 migrants en situation illégale ont été arrêtés dans les Alpes-Maritimes en février, dont 210 Tunisiens, quand en février 2009 ceux-ci étaient trois fois moins nombreux. Et encore ne s'agit-il que des clandestins interpellés. «Il y en a peut-être deux à trois fois plus qui passent sans se faire repérer», spéculait vendredi un préfet.

À la Direction centrale de la police aux frontières, des rapports parviennent quotidiennement sur des arrestations d'illégaux passant par Modane, le tunnel du Mont-Blanc, la frontière italo-suisse et jusque dans le Doubs. «Ce sont principalement des Tunisiens, explique un haut responsable de cette direction. Depuis les événements, nous n'avons pris en compte qu'une vingtaine d'Égyptiens et quelques Libyens.» Mais l'Office français de l'immigration et de l'intégration, placé depuis un mois sous la présidence de Dominique Paillé, se prépare à l'arrivée quasi inéluctable d'un contingent de Libyens.

Faille juridique

Claude Guéant, vendredi, n'a pas tergiversé : «La France ne saurait accepter cette immigration économique qui prend prétexte d'événements politiques. Il serait tout de même paradoxal de les accueillir alors que leurs pays s'ouvrent à la liberté et à la démocratie !» a-t-il dit.

Autre message adressé cette fois aux Italiens : «Nous attendons qu'ils retiennent les clandestins se présentant chez eux et qu'ils reprennent les personnes que nous leur remettons lorsque nous les interpellons» , a-t-il déclaré, souriant mais ferme. De fait, sur les 436 clandestins arrêtés entre Menton, Cannes ou Nice, seulement 250 ont été réadmis en Italie, sans assurance d'ailleurs qu'ils ne tentent pas à nouveau leur chance.

Mais le combat le plus dur reste franco-français. Dans la lutte contre ce fléau, la police se sent abandonnée par la justice. «Les clandestins non réadmis en Italie ont quasiment tous été remis en liberté par le tribunal administratif ou le juge des libertés», regrettait vendredi un gradé de la gendarmerie. Et sur les 27 passeurs arrêtés, trois seulement ont été écroués. La faille est juridique. La France n'a pas encore transposé la directive européenne de 2008 qui fixe les règles du retour dans son pays pour un clandestin. La loi Besson doit y remédier. Mais elle n'entrera pas en application avant juin. En attendant, l'Intérieur est suspendu à une décision du Conseil d'État qui doit, le 7 mars, se prononcer sur sa demande de dérogation provisoire à la règle européenne. Pour pouvoir encaisser la vague migratoire venue du Sud.

4/2/2011, Jean-Marc Leclerc

Source : Le Figaro

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