samedi 23 novembre 2024 15:32

France : Le grand malaise des musulmans de l'UMP

Choqués par le débat sur la laïcité lancé par Jean-François Copé, certains musulmans ont appelé à quitter le parti majoritaire.

Si le débat sur la laïcité n'aura lieu que le 5 avril prochain, la controverse a elle d'ores et déjà commencé. Au sein même de l'UMP, certains craignent un scénario identique à celui sur l'identité nationale.

Jeudi soir, lors d'une rencontre à la grande mosquée de Paris, son recteur, Dalil Boubakeur, a demandé à Nicolas Sarkozy d'annuler ce débat "qui n'a pas lieu d'être". Certains sont allés plus loin. Ainsi, Abderrahmane Dahmane, conseiller de l'Elysée en matière d'intégration, a appelé ses coreligionnaires à ne pas renouveler leur adhésion à l'UMP. [MàJ 16h: Abderrahmane Dahmane a été limogé ce vendredi de ces fonctions de conseiller à l'Elysée]. Joignant le geste à la parole, Abdallah Zekri, chargé de mission au conseil français du culte et responsable de section de l'UMP dans le Gard, a déchiré sa carte du parti devant les caméras.

Des attaques permanentes

Un happening isolé? Pas si sûr, tant le malaise semble profond chez certains militants. Pour Kamel Hamza, élu UMP de Seine-Saint-Denis et président de l'Association nationale des élus locaux de la diversité, ce débat est "devenu un fourre-tout, qui agite le chiffon rouge du spectre du FN".

Abdallah Zekri déchire sa carte de l'UMP devant les caméras, jeudi 10 mars.

D'abord favorable au débat, cet ancien assistant parlementaire d'Eric Raoult prône aujourd'hui son report après les élections présidentielles, "par Nicolas Sarkozy ou un autre". "Je le constate sur le terrain, la construction des mosquée est un sujet d'incompréhension pour les musulmans et les non-musulmans, explique-t-il. Ce débat soulève de vraies questions mais je crains qu'il ne soit plus qu'un enjeu politicien bien loin des préoccupations citoyennes."

L'appel de Rachida Dati

L'ex garde des Sceaux Rachida Dati a fustigé dans une tribune publiée dans Le Monde le "manque de courage" de classe politique et "spécialement de la gauche" sur les sujets liés à l'immigration. Un immobilisme qui a selon elle favorisé la montée des extrêmes, le communautarisme et la faillite de notre modèle d'intégration.

 

Regrettant que les musulmans soient trop "souvent stigmatisés", elle souhaite que les préjugés sur la communauté musulmane cessent. "Les musulmans ne revendiquent pas le droit de prier dans la rue", affirme-t-elle.

"Notre modèle d'intégration est malade, c'est une évidence. Mais il n'est pas trop tard pour le revivifier." L'euro-députée conclut en lançant un appel pour "trouver une solution à ce problème de manière sereine et dépassionnée".

"On agite le drapeau de la peur"

Certains n'ont pas attendu l'annonce du débat sur l'islam pour prendre leurs distances. C'est le cas d'Amine Benalia-Brouch, le protagoniste de la vidéo de Brice Hortefeux sur les "Auvergnats", farouchement opposé à ce qu'il estime être une "stigmatisation ridicule des musulmans".

"Il y a deux poids, deux mesures. Ce débat est intitulé 'débat sur la laïcité' mais on ne parle que d'islam au final. On agite le drapeau de la peur pour grappiller des voix au Front national", affirme le jeune homme qui a quitté l'UMP à l'été 2010 pour rejoindre République solidaire de Dominique de Villepin.

Même s'il reconnaît l'utilité du débat sur la laïcité et l'initiative de Jean-François Copé qu'il considère comme un homme "sérieux et réfléchi", Amine regrette la manière dont les musulmans sont pointés du doigt. "Je suis d'accord pour débattre du financement des mosquées et de la nourriture halal dans les cantines mais j'espère que Jean-François Copé saura tenir ses militants et éviter les dérapages comme celui de Chantal Brunel que je condamne."

A l'UMP, d'autres appellent chacun à garder son calme. Pour Samia Soultani-Vigneron, secrétaire nationale en charge de l'enseignement supérieur, cette polémique est "exagérée". "Je trouve dommage que certains s'isolent, estime la jeune femme. Si des musulmans ne sont pas d'accord avec les questions soulevées par le débat, il faut qu'ils restent au sein du parti pour l'exprimer."

11/3/2011

Source : L’Express.fr

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