A quelques heures des élections cantonales, l'UMP est dans une position inconfortable, tancée par ses opposants après les déclarations de Claude Guéant cette semaine. Le nouveau ministre de l'Intérieur a essuyé les critiques. La droite fait bloc derrière lui.
Faut-il déjà sauver le soldat Guéant ? Parachuté place Beauvau il y a à peine trois semaines lors du dernier remaniement, le premier flic de France est à présent en territoire hostile. En cause ? Cette phrase sur « l'immigration incontrôlée » et « les Français qui ont le sentiment de ne plus être chez eux », dégoupillée jeudi sur le plateau d'Europe 1. Le propos a eu l'effet d'une bombe... qui a explosé entre les doigts de son artificier. L'opposition a immédiatement contre-attaqué, dénonçant un discours xénophobe digne du Front national, une manoeuvre populiste « à trois jours des cantonales », tandis que la majorité faisait bloc derrière l'ancien secrétaire général de l'Elysée.
« Rien de commun » avec Marine Le Pen
François Baroin, le porte-parole du gouvernement, a estimé qu'il n'y avait pas de « procès en sorcellerie » à faire à Claude Guéant. En sorcellerie peut-être, mais en « provocation à la haine, à la discrimination et à la violence », si, selon l'association « SOS Soutien ô sans papiers ». Celle-ci à annoncé vendredi le dépôt d'une plainte contre le ministre de l'intérieur.
« Les citoyens de ce pays doivent choisir de façon nette entre d'une part l'humanisme et l'universalisme issus des Lumières et d'autre part une politique racialiste qui place la France à la traîne de l'Europe et au ban des nations », a déclaré Rodolphe Nettier, le président de l'association. Décidément la place Beauvau attire les coups. L'ancien locataire, Brice Hortefeux, avait déjà été condamné en première instance en juin dernier pour injure raciale.
Claude Guéant s'était pourtant justifié vendredi, sans pour autant dévier de sa ligne. En réponse à l'ironie railleuse de Marine Le Pen, la présidente du Front national, qui lui avait proposé après sa sortie une « carte d'adhérent d'honneur » de son parti, le ministre avait réagi : « Si jamais je reçois cette carte, je la renverrai immédiatement à Mme Le Pen, je ne me sens rien de commun avec ses idées et son parti ». « J'ai dit que les Français souhaitent que la France reste la France. Je m'étonne que l'on puisse contester ce constat », avait-il poursuivi.
« L'idée d'une France blonde aux yeux bleus »
Après sa petite phrase de jeudi, la gauche s'était indignée. Harlem Désir, le n°2 du Parti socialiste avait rétorqué que Claude Guéant tentait de « doubler le Front national sur sa droite » et Cécile Duflot, la patronne d'Europe-Ecologie-les-Verts, avait dénoncé « le cynisme venimeux » du propos. Jean-Luc Mélenchon, coprésident du Parti de Gauche (PG), n'avait pas encore réagi. C'est chose faite depuis vendredi. Invité sur RMC-BFM-TV, le député européen a fustigé « l'idée d'une France blonde aux yeux bleus » défendue selon lui par le ministre de l'Intérieur.
Une référence assumée au racialisme de la Seconde guerre mondiale : « Il y a eu une génération, c'était les juifs. Ca commence à bien faire. Ca n'a pas servi de leçon, ça ? De regarder les autres de travers, de dire « celui-là il a le nez crochu, l'autre il a les oreilles décollées ». Ca suffit pas? On va recommencer ? » S’est-il exaspéré. Avant de lâcher : « Pourquoi voulez-vous que le peuple français soit le seul peuple qui ait envie d'avoir un fasciste à sa tête, pourquoi ils seraient comme ça les Français ? ». Lui-même objet d'une plainte pour « injures » déposée par le Front National, l'ex-ministre de Jospin ne perd pas son franc-parler.
19/3/2011
Source : France Soir