Le gouvernement devra composer avec sa majorité, notamment sur l'acquisition de la citoyenneté.
Alors que le ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, a affirmé sa volonté de «réduire le volume de l'immigration légale», suscitant une vive polémique, le projet de loi sur l'immigration, l'intégration et la nationalité est examiné depuis mardi au Sénat en deuxième lecture.
Déjà, le 8 mars, Nicolas Sarkozy, confronté aux critiques de l'aile gauche de sa majorité, avait renoncé à l'une des principales mesures annoncées dans son discours de Grenoble en juillet 2010: l'extension des cas de déchéance de la nationalité aux meurtriers d'un policier ou d'un gendarme.
Le principe «pas de nullité sans grief»
Le gouvernement pourrait être conduit à des concessions supplémentaires en vue d'obtenir l'approbation de la Haute Assemblée, où l'UMP ne dispose plus que d'une majorité relative. D'autant que les sénateurs UMP sont moins disciplinés que leurs collègues députés. La réforme du contentieux de l'éloignement des étrangers en situation irrégulière constitue le cœur du texte. Selon le gouvernement, l'enchevêtrement des compétences entre le juge administratif et le juge judiciaire dans ce domaine contribue au nombre important de reconduites à la frontière annulées par les tribunaux.
Claude Guéant voit manifestement dans le nombre élevé de décisions de justice défavorables à l'administration une sorte de victoire de la chicane. Il souhaite donc limiter la marge d'interprétation des magistrats en inscrivant le principe «pas de nullité sans grief» dans le Code des étrangers. Or, la droite sénatoriale s'y oppose, jugeant illusoire la distinction entre «nullités formelles» et «nullités substantielles» en matière de privation de liberté.
Le ministre de l'intérieur préconise que le juge des libertés et de la détention (JLD) n'intervienne qu'au terme de cinq jours pour autoriser le maintien d'un étranger en situation irrégulière en zone de rétention. Or, les sénateurs souhaitent que le JLD soit saisi après quarante-huit heures.
Une charte rappelant les droits et les devoirs
Claude Guéant recommande que les zones d'attente temporaires, destinées à permettre aux préfets de faire face à l'arrivée d'un nombre important d'étrangers en dehors d'un point de passage frontalier, puissent être créées sans date limite.
Les sénateurs, eux, veulent que ces zones d'attentes temporaires ne puissent excéder vingt-six jours. Les députés ont supprimé le caractère automatique de l'acquisition de la nationalité française des enfants nés en France de parents étrangers et ayant leur résidence habituelle en France, lui préférant une démarche volontaire. Le rapporteur UMP François-Noël Buffet (Rhône) s'y oppose pour des raisons tenant à la procédure législative, et ses collègues centristes y sont hostiles sur le fond.
Plusieurs mesures du texte ont déjà été approuvées par les deux Assemblées. La durée de résidence acquise au moyen d'un mariage frauduleux avec un ressortissant français ne pourra être invoquée à l'appui d'une demande d'attribution d'une carte de résident. Les étrangers sollicitant la naturalisation devront signer une charte rappelant les droits et les devoirs du citoyen français. L'administration évaluera leur niveau de maîtrise du français. Le Sénat devrait se prononcer sur l'ensemble du projet de loi dans la soirée.
12/4/2011
Source : Le Figaro