Quoique leur rythme se soit ralenti, depuis la crise financière et économique de 2008, les transferts d'argent effectués par les Marocains résidant à l'étranger continuent toujours à jouer un rôle de premier rang dans l'économie nationale, aussi bien sur le plan macroéconomique qu'au niveau des familles qui en bénéficient. Car même si la physionomie de la diaspora marocaine change et ses habitudes évoluent, son attachement au pays et à la famille n'a pas subi de mutation notable. Et ce n'est pas pour demain que cette donne changera, d'après les observateurs et comme le laissent apparaître les différents rapports à ce sujet.
Il en est ainsi d'un récent rapport réalisé conjointement par la Commission économique de l'ONU pour l'Afrique (CEA) et de l'Union africaine (UA), qui fait ressortir que le Maroc figure parmi les six pays africains ayant le plus bénéficié des transferts de fonds des émigrés. Les cinq autres pays sont l'Algérie, l'Égypte, le Nigeria, le Soudan et la Tunisie. Avec le Maroc, ces pays ont absorbé plus de 75 % du total des transferts vers le continent. Le rapport, qui porte sur les perspectives économiques de l'Afrique en 2011, note également un recul des entrées totales d'envois de fonds en Afrique, en raison des répercussions de la crise économique mondiale de 2008. Ce qui a mis un coup de frein à la montée en puissance de ces transferts ces dernières années.
En fait, relève le rapport, les envois de fonds ont, en valeur, considérablement augmenté au niveau mondial durant la dernière décennie, avant que ce trend ne se rompe. «Les pertes d'emplois dues à la crise économique mondiale et les conditions de travail plus difficiles des migrants dans les pays d'accueil ont modifié cette tendance», précise ce rapport qui indique que ces transferts sont passés successivement de 41,1 milliards de dollars en 2008, à 38,5 milliards en 2009 et à 21,5 milliards de dollars en 2010. Par ailleurs, ce ralentissement des envois des MRE est visible dans les statistiques de l'Office des changes qui montrent que ces transferts n'ont progressé que de 2,1% ou +334,2 MDH au cours des quatre premiers mois de cette année par rapport à la même période de 2010 (16,58 MMDH contre 16,25 MMDH). Il est à rappeler qu'en 2010, ces transferts ont porté sur 54,09 MMDH contre 50,21 MMDH en 2009, en progression de 7,7% ou +3,88 MMDH. Par rapport à la moyenne des années 2005 à 2009, soit 49,37 MMDH, ces recettes ont progressé de 9,6% ou +4,72 MMDH. En outre, ces flux financiers, qui représentent à peu près 9% du PIB du pays, jouent un rôle socioéconomique d'une grande importance.
Certes, d'après les études qui ont été réalisées à ce sujet, plus de 75% de ces fonds sont destinés au soutien familial et une petite part seulement du reste est dédiée à l'investissement, en particulier dans le domaine immobilier. Toutefois, les économistes signalent que le soutien familial est tout aussi important que l'investissement, du fait qu'il contribue à la lutte contre la pauvreté. Surtout que la plupart des MRE sont issus des régions pauvres et du monde rural. D'ailleurs, souligne-t-on, cette solidarité des MRE n'est pas seulement destinée à leurs familles, mais également à leurs communautés, comme l'illustrent les projets de développement local qui sont initiés par les MRE dans des régions, en particulier dans le Sud.
Toutefois, cela ne dispense pas les intervenants dans ce domaine de concevoir et de mettre en place des dispositifs et des mécanismes pour orienter les 25% restants vers l'investissement.
Encourager l'investissement
Pour inciter les MRE à investir, l'État a créé le fonds «MDM Invest». Lancé en juillet 2009, il est géré par la Caisse centrale de garantie et est ouvert aux MRE présentant un nouveau projet d'investissement ou un projet d'extension d'un montant égal ou supérieur à 1 MDH, promu directement par un MRE. Le montage financier des projets combine un apport personnel en devises de 25% du coût du projet, une aide de l'État de 10% du coût du projet et un financement bancaire pouvant atteindre 65% du coût du projet.
De même, on a procédé à l'extension de la garantie du fonds «Damane Assakane» aux MRE, aux mêmes conditions que pour les résidents.
25/5/2011, Lahcen OUDOUD
Source : Le Matin