En avril, la France avait relancé le débat sur le rétablissement du contrôle des frontières intérieures à la suite de l'arrivée de migrants d'Afrique du Nord. Les États membres cherchent à s'entendre sur ce sujet qui divise.
Réunis à Bruxelles pour le Conseil européen, les chefs d'État et de gouvernement de l'Union européenne doivent se pencher ce matin sur l'aménagement de la gouvernance de l'espace Schengen. Un sujet crucial qui divise les pays membres. Les désaccords tiennent à un point précis : la possibilité de rétablir le contrôle d'identité aux frontières intérieures en cas d'afflux massif de migrants.
La convention de Schengen prévoit déjà des exceptions à la libre circulation entre ses membres. Un État peut rétablir ses frontières « lorsque l'ordre public ou la sécurité nationale l'exigent », pour une « période limitée ». Mais la France, qui a
lancé le débat, veut plus. Fin avril, l'Élysée évoquait une « suspension provisoire » de Schengen lors d'une « défaillance
» à une frontière extérieure. « Pour que Schengen vive, Schengen doit être réformé, avait précisé Nicolas Sarkozy. Si un pays défaillant a gardé les frontières des autres, qu'est-ce qu'on fait ? »
L'arrivée de migrants tunisiens en Italie depuis le début de l'année avait mis le feu aux poudres. Plus de 20 000 d'entre eux ont en effet pu prétendre à un « titre de séjour provisoire » dans ce pays, leur donnant le droit de circuler dans tout l'espace Schengen.
Au final, la France a-t-elle obtenu gain de cause ? Le texte des conclusions du Conseil, dont La Croix s'est procuré une version provisoire, souligne que la libre circulation, effective depuis 1995, est un « principe central » de l'Union européenne. Mais le
Conseil ménage la chèvre et le chou. Comme le souhaitait la France, il suggère la création d'un « mécanisme de sauvegarde » permettant de rétablir des contrôles temporaires aux frontières dans des « circonstances exceptionnelles ».
Deux circonstances sont mentionnées : une pression migratoire massive et inattendue sur une frontière extérieure ; la défaillance d'un État périphérique dans le contrôle de ses frontières.
Ainsi s'élargit le spectre des possibilités du rétablissement des contrôles.
Le texte se veut néanmoins très restrictif quant à l'utilisation du mécanisme, lequel ne pourra intervenir que « dans un périmètre et pour une période strictement limités », en fonction de critères précis. Le Conseil a dû écouter l'opposition de certains pays aux volontés françaises – la Pologne, la Lettonie, Malte et la Grèce, selon nos informations. «
Nous ne sommes pas partisans d'un changement du système actuel, ce qui existe est suffisant », avait déclaré, début juin, le porte-parole de la future présidence polonaise du Conseil de l'UE, Konrad Niklewicz.
Reste à savoir qui enclenchera le processus de réforme. La France et l'Allemagne sont partisans d'une décision prise entre gouvernements. D'autres, comme la Belgique, considèrent que la Commission doit jouer un rôle.
Un point que celle-ci devrait défendre dans ses propositions, plus concrètes, attendues à l'automne.
Marianne Meunier et Nathalie Vandystadt
Source : La Croix