Depuis le 5 juillet, Copenhague contrôle plusieurs points d’entrée de son territoire. La question est de savoir si le principe de libre circulation des personnes prévu par les accords de Schengen est respecté.
Les automobilistes ont désormais intérêt à ralentir à l’approche du poste frontière de Froeslev, entre l’Allemagne et le Danemark. Depuis le 5_juillet, une trentaine de douaniers danois exercent un contrôle aléatoire des véhicules. Un scénario identique se déroule au bout du pont qui relie le Danemark à la Suède,
ainsi qu’au port de Gedser, où débarquent les ferrys venus d’Allemagne.
Ces nouvelles formalités n’irritent pas que les conducteurs pressés. Le porte-parole de la commissaire européenne aux a aires intérieures,
Cecilia Malmström, dit «suivre très strictement» les méthodes danoises. L’objectif est de vérifier si elles n’enfreignent pas un principe cardinal de l’Union européenne, inscrit dans la convention de Schengen: la libre circulation des personnes. Le texte abolit les contrôles aux frontières intérieures de l’UE et ne prévoit leur rétablissement, temporaire, que «si l’ordre public ou la sécurité nationale» l’exigent. Signataire, le Danemark n’enfreint-il pas désormais la règle?
La Commission est vigilante. Elle n’a pas dépêché d’équipe aux frontières danoises, mais envoyé à la
«_représentation permanente_» (l’équivalent d’une ambassade) du Danemark auprès de l’UE une lettre contenant une série de questions, portant sur la fréquence des contrôles, leurs critères, leurs méthodes…
Les réponses sont actuellement analysées. Il n’est donc pas exclu que le Danemark soit contraint de faire marche arrière.
Copenhague, qui assure avoir l’intention de respecter ses engagements, se défend en soutenant que les contrôles visent les marchandises et non les personnes. La nuance peut être néanmoins ténue. «Ce qui inquiète la Commission, c’est que cela soit contraire à la libre circulation des personnes et des marchandises, ou l’une des deux», dit Tove Ernst, au bureau de Cecilia Malmström.
Malgré un objectif affiché de lutter contre les importations illégales, la décision du gouvernement danois, prise en mai, vise un objectif politique.C’est une réponse à une demande de l’extrême droite, alliée de
l’équipe au pouvoir. La Norvège (signataire de Schengen mais n’appartenant pas à l’UE), dont le ministre
de la justice a annoncé, le 6_juillet, avoir «établi des contrôles très solides _» à proximité de la frontière suédoise, est plus explicite: «Cela combat la criminalité et permet d’attraper les demandeurs d’asile clandestins », a déclaré le ministre Knut Storberget. Déployer une présence policière aux abords des frontières n’est pas interdit par Schengen.
En vogue depuis que la France et l’Italie ont, en avril, soulevé le problème de la libre circulation lorsqu’un État fait face à un afflux de migrants, le sujet du contrôle des frontières inquiète certains États membres. Interrogé à Paris lors d’une conférence de presse, l’ambassadeur de Pologne en France – dont le pays
préside l’Union depuis le 1er_juillet , a réagi en ces termes: «Pour un pays qui a connu les murs, les barbelés, les sentinelles comme la Pologne, avoir la libre circulation des personnes peut être une valeur un peu plus grande que pour vous qui avez la libre circulation depuis des décennies.»
12/7/2011, MARIANNE MEUNIER
Source : La Croix