jeudi 4 juillet 2024 02:25

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A Singapour, des sociétés privées s'occupent de rapatrier les immigrés

A Singapour, la législation stricte sur l'immigration enrichit les sociétés de rapatriement, chargées de retrouver et renvoyer chez eux les travailleurs étrangers dont le visa a expiré. Mais leurs méthodes suscitent les critiques des groupes de défense des immigrés.

V. Balakrishnan a placé son bras autour des épaules de Mohammad Abdul Mannan et le guide, tel un bon copain, vers la sortie de la station de métro. Mais soudain, le jeune Bangladeshi se libère de cette étreinte, lâche son sac, et fuit en courant, perdant ses tongs dans la course.

Balakrishnan travaille pour UTR Services, une société à laquelle ont recours les entreprises pour retrouver et amener à l'aéroport leurs employés étrangers dont les visas arrivent à expiration.

La législation de Singapour tient pour responsables les employeurs qui doivent s'assurer du rapatriement de leurs employés étrangers qui n'ont plus de visa.

Singapour - cinq millions d'habitants - emploie 900.000 "travailleurs invités". Ils occupent le plus souvent les emplois dédaignés par les Singapouriens et viennent notamment de pays pauvres d'Asie.

Balakrishnan et son partenaire avaient mis cinq jours à retrouver la trace de Mohammad, qui s'était caché dans une zone forestière près de la frontière avec la Malaisie. Ils l'ont perdu au dernier moment.

Les firmes de rapatriement sont payées 250 dollars de Singapour (146 euros) par affaire, mais elles sont critiquées par les groupes de défense des droits de l'Homme qui les accusent de maltraiter les migrants.

"Les sociétés de rapatriement utilisent la force, la violence et enferment les travailleurs contre leur gré" avant qu'ils soient mis dans un avion, affirme Jolovan Wham, directeur de l'Organisation humanitaire des migrations économiques (HOME).

"Les travailleurs sont arrêtés et enfermés dans les locaux des sociétés contre leur volonté. C'est du kidnapping et de l'enfermement illégal, c'est contre le code pénal", déclare M. Wham.

Selon lui, les employés de ces sociétés de rapatriement veillent à ne pas laisser de traces visibles de violence sur les personnes arrêtées.

Un rapport du département d'Etat américain, appelé "Le trafic des personnes", mentionnait en juin des abus présumés, mais Singapour a rejeté la plupart des accusations, affirmant que cette étude était "truffée d'erreurs".

Le directeur de UTR Services, J. Ravi, nie que ses employés aient recours à la force.

Selon lui, 85% des 2.000 travailleurs étrangers rapatriés chaque année via sa société le sont volontairement.

Il admet cependant que l'usage de "loger" les travailleurs dans les locaux de l'entreprise avant qu'ils prennent l'avion, et l'interdiction de sortir non accompagnés, est "un peu controversé". Il souhaite abolir ces pratiques, dit-il à l'AFP.

"La loi est très claire. L'employeur a le droit de mettre fin à un contrat (...). Vous mettez fin au contrat, je renvoie pour vous le travailleur chez lui", explique-t-il.

Invité à visiter les locaux d'UTR Services, le journaliste de l'AFP n'a vu que quatre hommes originaires d'Asie du Sud-est regardant un film de Bollywood, dans une pièce équipée de la climatisation. Ils étaient sur le point d'être renvoyés dans leur pays.

Un responsable du ministère de l'Intérieur assure n'avoir reçu en 2010 que deux plaintes déposées par des travailleurs pour enfermement par des sociétés de rapatriements.

Mais selon Jolovan Wham, de HOME, les rapatriements forcés sont quotidiens. "Les travailleurs migrants sont perçus comme un problème social et de potentiels immigrants illégaux. Les autorités sont contentes de déléguer cette tâche aux sociétés de rapatriements", déclare-t-il.

3/8/2011

Source : AFP

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