Si Aminata Sangaré n’a pas été embauchée comme caissière par Lidl, est-ce une conséquence de la politique d’immigration de Nicolas Sarkozy? Le procès opposant cette Ivoirienne à son ancien employeur devait avoir lieu ce jeudi matin à Senlis (Oise). L’audience a été renvoyée au 23 novembre. La question reste donc en suspens. Reste qu’elle se pose.
Pour tenter d’expliquer cette histoire, l’avocat d’Aminata Sangaré, comme celui de José-Jaime Teixera-Portela, directeur régional de l’enseigne, poursuivi pour discrimination avec son responsable administratif, Franck Vamour, évoquent tous deux le sort que le gouvernement réserve aux employeurs d’étrangers, même en situation régulière.
L’affaire Aminata Sangaré débute en 2009: «Ma cliente a été en stage chez Lidl pendant six mois. Ça s’est très bien passé, et le directeur du magasin (de Nogent-sur-Oise) l’a invitée à signer un contrat de travail», raconte Vivien Guillon, son avocat.
Seulement, ce supérieur se serait alors aperçu que cette femme mariée à un Français était titulaire d’une carte de séjour «vie privée et familiale» (VPF) d’une durée d’un an. «Il est sorti de la pièce pour appeler sa hiérarchie, poursuit Me Guillon. Et, lorsqu’il est revenu, il lui a dit que son embauche n’était pas possible.»
«Peut-être que Lidl ne voulait pas recruter une personne qui risquait d’être expulsée dans un an», suppute l’avocat. Le mari d’Aminata Sangaré –un gendarme– appelle le directeur du magasin. «Celui-ci a fait état de directives faisant obstacle à l’embauche de personnes titulaires d’un titre de séjour VPF», poursuit Me Guillon.
Y a-t-il effectivement eu des consignes de Lidl? L’avocat affirme être en possession d’une «dizaine de témoignages concordants».
Pour sa part, Olivier Gutkes, le défenseur de José-Jaime Teixera-Portela, souligne les tracasseries administratives auxquelles sont soumises les entreprises désirant employer des étrangers. Au point que Lidl aurait décidé de changer sa politique sociale?
Hier, une petite centaine de salariés vêtus du tee-shirt bleu de l’enseigne sont venus soutenir leurs patrons devant le tribunal. Parmi eux, des titulaires de carte VPF. «Ces personnes ont pu être embauchées avant que cette politique soit mise en place», observe Me Guillon.
La justice prend la plainte d’Aminata Sangaré au sérieux. Elle avait soumis José-Jaime Teixera-Portela à un contrôle judiciaire hebdomadaire et au versement d’une caution de 2500 euros. Hier, le président a allégé cette obligation. Le directeur régional ne devra plus pointer au commissariat qu’une fois par mois.
18/8/2011
Source : Libération