samedi 23 novembre 2024 21:55

Diplômés étrangers : Guéant désavoué ?

Étudiants étrangers non grata en France : la circulaire Guéant pourrait être « corrigée » mardi. Aux critiques des directeurs d'écoles ou de chefs d'entreprise se joignent maintenant celles de plusieurs membre du gouvernement.

Depuis quelques semaines, comme nous le relations, c'est un « non » quasi systématique aux étudiants demandant un changement de statut pour une première expérience professionnelle en France : c'est la conséquence de la circulaire du 31 mai (en PDF,). Objectif pour les co-signataires (le duo Guéant-Bertrand) : réduire l'immigration professionnelle. D'où la diminution, en juillet, de près de la moitié des métiers en tension pour les ressortissants non-communautaires.

« On arrivera pas à remplacer ces gens-là »

Malgré les années passées en France, des diplômes prestigieux, des promesses d'embauches, des centaines d'étudiants ont quelques semaines pour quitter le pays. Pour certaines entreprises comme le cabinet de conseil Solucom dont neuf de leur salariés ont reçu un avis négatif, la circulaire est inadaptée :

« On sait que l'on n'arrivera pas à remplacer ces gens-là. »

L'enseignement supérieur a aussi fait part de ses inquiétudes. Pour Louis Vogel, président de la Conférence des présidents d'université, la circulaire est « très grave ». Elle peut aussi détruire les conventions passées avec les universités étrangères. Pierre Tapie, président de la Conférence des grandes écoles, a aussi exprimé ses craintes dans un courrier adressé à M. Guéant.

Les critiques fusent : l'Unef « exige le retrait » de la circulaire, tout comme le Collectif du 31 mai, qui regroupent des étudiants. Ou le PS qui fait remarquer, dans un communiqué :

« Après les avoir formés, refuser à ces diplômés la possibilité de faire profiter notre pays de leurs talents est proprement aberrant. »

Durcissement (aussi) des conditions financières

Outre la circulaire du 31 mai, les étudiants étrangers sont également visés par un décret daté du 6 septembre. Ce-dernier exige des ressources financières plus importantes pour bénéficier d'un titre de séjour. Concrètement, l'étudiant doit attester qu'il dispose de 5 500 euros sur son compte, soit 1500 euros de plus qu'en 2010, selon l'Unef qui dénonce « une véritable sélection sociale dans l'accès au titre de séjour ».

La majorité pas d'accord

Même dans le gouvernement, la méthode Guéant (qui veut réduire par tous les moyens l'immigration légale de 200 000 à 180 000 personnes par an) fait grincer des dents.

Valérie Pécresse, sollicitée par les étudiants d'HEC, a (discrètement) glissé un courrier à son collègue de l'Intérieur, rapporte La Tribune. Pour la ministre du Budget, ces étudiants « représentent des atouts importants pour les entreprises qui souhaitent les recruter et donc pour notre pays ». Elle alerte :

« Si une telle situation devait perdurer, elle ne serait pas non plus sans conséquence sur l'attrait de nos grandes écoles et de nos universités à l'étranger. »

En mai, quelques jours avant la circulaire (cohérence oblige), la ministre avait annoncé sa volonté de recruter d'avantages d'étudiants étrangers en master et doctorat. Alors que beaucoup « n'inscrivent pas leur mobilité dans un véritable projet d'études et d'insertion professionnelle ».

Guéant devra revoir sa copie

Plusieurs parlementaires UMP, sous la houlette du député de la Marne Arnaud Robinet, ont également interpellé le ministère de l'Intérieur. Claude Guéant avait pourtant réaffirmé ses positions lors d'une réunion avec les préfets le 29 septembre :

« J'attire en revanche votre attention sur un sujet pour lequel les résultats ne sont pas satisfaisants : les changements de statut, qui permettent à un étudiant étranger, parfois abusivement, d'obtenir un titre de séjour de travail. Vous savez qu'il s'agit d'une source importante de l'immigration professionnelle. Xavier Bertrand et moi-même vous avons demandé que le nombre de ces changements de statut diminue. Or, la baisse du nombre des changements de statut est insuffisante. Cela doit changer. »

Il devrait revenir en arrière. Laurent Wauquiez, interviewé dans Le Monde daté du 7 octobre, tente le dialogue pour calmer la polémique. Pour le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, la circulaire n'est pas (officiellement) un raté. Il prend des pincettes :

« Le problème vient de son application, qui a pu être trop rigide. »

Le ministre relativise aussi ses conséquences :

« N'oubliez pas que l'on ne parle que de 200 étudiants et que cela a duré seulement quelques semaines. »

A un écart près, note le Collectif du 31 mai : il concerne bien plus de personnes. En 2010, ils étaient près de 6000 à avoir obtenu un changement de statut.

De nouvelles directives

Pour que le texte ne soit pas « surinterprété comme il l'a été », de nouvelles « directives » devraient être donné aux préfets. Selon Laurent Wauquiez, les deux ministres co-signataires de la circulaire « sont en phase avec cette idée ».

Mardi, Laurent Wauquiez doit recevoir au ministère de l'Enseignement supérieur les représentants des grandes écoles et des universités. Le collectif du 31 mai n'est pas inscrit dans la liste des invités : dans un courrier, les étudiants ont demandé à être de la partie.

10/10/2011

Source : Rue 89

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