dimanche 24 novembre 2024 00:42

Le populisme recule-t-il en Europe ?

L’Union démocratique du centre (UDC), parti de la droite populiste suisse, a enregistré son premier recul depuis vingt ans aux élections fédérales de dimanche 23 octobre.

En septembre, deux autres formations populistes, au Danemark et en Norvège, ont aussi essuyé des revers électoraux.

ENTRETIEN Jean-Yves Camus, politologue, chercheur associé à l’Iris (1), spécialiste des extrémismes et des nationalismes en Europe

« La notion de “populisme” est floue. En politique, elle est utilisée pour discréditer tel ou tel, de Silvio Berlusconi à Nicolas Sarkozy. À force de voir du populisme partout, on ne peut plus en envisager la substance. Stricto sensu, le populisme part de l’idée selon laquelle le peuple, avec son bon sens naturel, a toujours raison contre les élites, dévoyées.

En Suisse l’UDC, en Norvège le Parti du progrès, ou le Parti du peuple danois héritent de cette épithète parce qu’on ne sait pas bien où les situer. Ils appartiennent à la droite classique par leur acceptation du jeu parlementaire et leur absence de racine dans la droite fasciste, mais aussi à l’extrême droite par leur goût de l’appel au peuple ou leur politique d’immigration.

Il est trop tôt pour dire si ces partis reculent. Certaines défaites sont liées à des événements, comme la tuerie d’Utoya en Norvège, qui a nui au Parti du progrès (NDLR : dont l’auteur de la tuerie a été membre). Mais il est possible qu’il y ait, derrière, un mouvement profond de retour à une polarisation droite-gauche. En Suisse et au Danemark, la gauche reprend du poil de la bête. Quant à la droite, elle réussit à mobiliser une bonne partie de l’électorat autour de ses solutions à la crise.

« Déception »

Il y a aussi certainement une déception. Christoph Blocher (NDLR : vice-président de l’UDC), en acceptant de prendre le portefeuille de la police et de la justice, a peut-être scellé le déclin de l’UDC. C’est le genre de portefeuilles où l’on peut mesurer un hiatus entre les discours et les actes. On avait remarqué cette déception quand, en Autriche, le Parti de la liberté de Jörg Haider avait accepté le cadeau empoisonné du portefeuille des finances.

Le cas du Danemark est différent. Le pays avait acquis une réputation peu flatteuse en Europe et l’attitude des partis de droite, prisonniers du Parti du peuple danois, a agacé.

En Pologne, l’éradication de l’extrême droite que l’on a pu voir aux élections (NDLR : les 9 et 16 octobre) est le résultat d’une lassitude. Les électeurs se disent : autant voter pour un parti qui a de grandes chances de l’emporter, même s’il ne représente que 60 % de nos idées, que pour un parti marginal qui en représente 100 % mais n’arrivera jamais au pouvoir. »

(1) Institut des relations internationales et stratégiques.

24/10/2011,  MARIANNE MEUNIER

Source : La Croix

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