mercredi 27 novembre 2024 10:54

Accord de Schengen : la libre circulation en question

Ce texte ratifié en 1985 permet aux ressortissants des Etats signataires de circuler librement. Paris et Rome veulent qu'il puisse être suspendu en cas de flux migratoire inattendu.
Depuis quand existe Schengen?
L'accord de Schengen, du nom de la ville luxembourgeoise où il a été ratifié, a été signé le 14 juin 1985 à l'initiative de l'Allemagne, de la Belgique, de la France, du Luxembourg et des Pays-Bas. Face à l'absence de consensus au sein des dix membres d'alors de l'Union européenne, ces cinq pays veulent concrétiser l'objectif de libre circulation des personnes, énoncé dans le traité de Rome de 1957. Schengen n'est entré en vigueur qu'en 1995. Depuis 1999, il est intégré dans le cadre institutionnel et juridique de l'Union européenne.
Que prévoit Schengen?
Il supprime les contrôles aux frontières intérieures de l'Union européenne et garantit la libre circulation pour tous les ressortissants des États signataires. Ils peuvent voyager sans avoir à montrer leur passeport, munis d'une simple carte d'identité.
Les contrôles demeurent aux frontières extérieures des pays de l'espace Schengen. Tous les pays signataires doivent s'engager à en assurer la surveillance. Pour les aider, ils disposent du système d'information de Schengen (SIS). Cette base de données, accessible aux polices et aux consulats, recense la liste des personnes portées disparues et indésirables et des objets et des voitures volés. La police d'un Etat peut passer la frontière en cas de poursuite avec un criminel. La coopération anti-drogue est facilitée. Dans les aéroports, les passagers européens et voyageant à l'intérieur de l'espace Schengen sont séparés des autres voyageurs.
Schengen instaure aussi des règles communes en matière d'asile et une liste unique de pays non membres de l'UE dont les ressortissants doivent acquérir un visa, coûtant 60 euros, pour pénétrer dans l'espace Schengen. Une liste noire de personnes interdites de visas existe. Les autres Etats de l'UE doivent s'y conformer par solidarité à moins de justifier de «de raisons humanitaires» ou «d'obligations internationales».
Comment a évolué l'espace Schengen?
Vingt-six pays en sont membres aujourd'hui: vingt-deux issus de l'UE et quatre pays tiers - l'Islande, la Norvège, la Suisse et le Liechtenstein-.
Chypre, l'Irlande et le Royaume-Uni n'ont pas adhéré à Schengen et maintiennent les contrôles à leurs frontières. Depuis les années 2000, Dublin et Londres participent cependant au SIS.
Les États candidats à Schengen doivent obtenir l'autorisation des 26 membres de l'espace. Ils doivent avoir rempli des critères de contrôles dans les aéroports, de collecte de données, de coopération policière, de procédures de délivrance des visas etc. La Bulgarie et la Roumanie ont été recalées en 2011, en raison de l'opposition des Pays-Bas, insatisfaits des progrès réalisés en matière de surveillance des frontières extérieures et de lutte anti-corruption. Le précédent grec a échaudé les esprits. Entré dans Schengen en 1992, Athènes ne parvient pas à contrôler sa frontière avec la Turquie.
Dans quelles circonstances un pays peut-il rétablir les contrôles à sa frontière?
L'article 2.2 autorise un pays à le faire temporairement pour des motifs de «sécurité nationale». La décision a été prise en France lors des célébrations des 60 ans du débarquement ou après les attentats de Londres en 2005. En avril 2011, Paris a fermé ses frontières aux trains italiens qui transportaient des centaines de réfugiés tunisiens. En mai 2011, le Danemark sous l'influence de l'extrême droite a rétabli des contrôles douaniers «pour lutter contre la criminalité» à ses frontières suédoises et allemandes. Mécontente, la Commission a placé Copenhague sous surveillance.
Jusqu'à présent, les Etats peuvent agir de leur propre chef. La France et de l'Italie font actuellement pression pour élargir les clauses de rétablissement des contrôles en cas d'un afflux inattendu d'immigrants faisant peser un risque à la sécurité nationale, ou lorsqu'un Etat est jugé défaillant dans la surveillance de ses frontières. En échange, la Commission européenne souhaiterait que les Etats sollicitent son autorisation mais plusieurs pays sont opposés à un tel droit de regard.
13/3/2012, Constance Jame
Source : Le Figaro

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