vendredi 5 juillet 2024 00:30

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Deux ans après la circulaire Guéant, les diplômés étrangers toujours à la peine

La question des étudiants étrangers désireux de travailler en France revient dans le débat sur l'immigration professionnelle: l'abrogation de la circulaire Guéant leur a facilité la tâche, mais beaucoup se voient toujours opposer un refus.

L'abrogation de la circulaire Guéant a réduit le nombre de refus de changement de statut des diplômés étrangers, mais ne les a pas complètement supprimés.

Sans que lui-même ne soit jamais cité, l'ombre de Claude Guéant flottait ce jeudi sur l'Assemblée nationale. Ou plutôt celle de la circulaire qui porte le nom de l'ex-ministre sarkozyste. "Le changement du statut d'étudiant à celui de salarié doit être facilité pour les diplômés étrangers de master qui ont accès à un emploi de haut niveau", a affirmé Manuel Valls, lors d'un débat sans vote sur l'immigration professionnelle. Tout le contraire de ce qu'instaurait le texte signé le 31 mai 2011, pour restreindre la possibilité de travailler en France aux diplômés étrangers.

A en croire le ministre de l'Intérieur, ses effets se font toujours sentir: "Nous avons accueilli en 2012 10% d'étudiants étrangers en moins. (...) Le message négatif envoyé par la circulaire du 31 mai 2011 n'est pas étranger à cette désaffection." Le texte demandait aux préfectures d'instruire "avec rigueur" et un "contrôle approfondi" les demandes d'autorisation de travail des étudiants. En quelques mois, des centaines d'entre eux, souvent diplômés de filières prestigieuses, avaient dû faire une croix sur leur promesse d'embauche.

Une circulaire, puis une autre

"J'ai été sans-papier entre septembre et novembre", se souvient Laure, une Camerounaise diplômée de l'EM Lyon à l'été 2011. Embauchée par le cabinet d'audit PwC, elle avait essuyé un refus de la préfecture. Motif: son métier n'était pas jugé "en tension". L'employeur a dû embaucher un avocat pour qu'elle obtienne un titre de séjour. Il y avait aussi cette Américaine, sortie de Yale et de Sciences Po, contrainte de transformer un CDI en stage pour pouvoir rester en France.

260 000 jeunes étrangers ont étudié en France en 2010, ce qui en fait le 4e pays d'accueil dans le monde. Selon le ministère de l'Enseignement supérieur, 10 000 veulent y commencer leur carrière.

Autant de symboles mal venus: présidents d'université, chercheurs, mais aussi recruteurs s'en étaient émus. Comme promis pendant la campagne, François Hollande a donc abrogé la circulaire Guéant un an plus tard, lui substituant un nouveau texte. "Une attention particulière sera portée aux demandes de premières expériences professionnelles, en tenant compte des recommandations fournies par les chefs d'établissement supérieur sur le niveau d'études et les chefs d'entreprise sur l'adéquation à l'emploi", promettait le gouvernement. Le délai maximum d'instruction des dossiers devait aussi être réduit à deux mois.

Les refus continuent

Mais les difficultés n'ont pas disparu. "Il y a eu quelques améliorations. Les refus de changement de statuts sont moins nombreux que les années précédentes, mais nous recevons encore beaucoup d'appels d'étudiants et de diplômés qui cherchent à déposer des recours", constate Fatma Chouaieb, porte-parole du Collectif du 31-Mai, créé en 2011. "Il n'y a plus de mot d'ordre de rigueur dans les préfectures, explique-t-elle. Mais la procédure normale reste lourde et inadaptée au marché du travail actuel."

Pour embaucher un diplômé étranger, l'employeur doit par exemple prouver que son offre déposée auprès d'un organisme "concourant au service public de placement" n'a pas trouvé preneur chez les candidats français. "Sauf que 70% des entreprises qui recrutent au niveau master ne publient pas d'annonce à Pôle emploi, observe Fatma Chouaieb. Et les autres canaux de diffusion et de recrutement, comme les forums emploi, ne sont pas pris en compte." Quant au délai maximum de deux mois pour le traitement des dossiers, il n'est pas toujours respecté.

Une loi ou pas?

Pour sécuriser la situation des étudiants et modifier les procédures en profondeur, le Collectif veut en passer par la loi. Il réclame notamment le prolongement de la durée des autorisations provisoires de séjour. Ce document permet aux jeunes diplômés d'acquérir une première expérience professionnelle en France, mais pour six mois seulement, avec l'engagement de repartir dans leur pays d'origine. "Ce n'est pas adapté aux besoins des entreprises dans un contexte international où l'objectif est d'attirer les meilleurs", juge Fatma Chouaieb.

Une proposition de loi déposée mi-février par la sénatrice PS Dominique Gillot reprend leurs propositions. D'après Le Monde, les ministères de l'Enseignement supérieur et des Affaires étrangères l'approuvent. Celui de l'Intérieur semble moins pressé de voir la proposition inscrite à l'ordre du jour. Le temps presse pourtant, prévient le Collectif: la rentrée de septembre approche, et avec elle de nouveaux dossiers de diplômés désireux de travailler en France.

13/06/2013, Alexia Eychenne

Source : L'Express

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