vendredi 5 juillet 2024 04:25

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Golfe : le système de parrainage source d'abus (PAPIER D'ANGLE)

Le footballeur franco-algérien Zahir Belounis a été la dernière victime du système controversé de parrainage, dit Kafala, qui régit les relations de travail entre les étrangers attirés par la manne pétrolière et leurs employeurs dans les pays du Golfe.

Critiqué par les défenseurs des droits de l'Homme, ce système assimilé parfois à une forme d'esclavagisme moderne prend une forme extrême en Arabie saoudite et au Qatar, où l'employé ne peut quitter le pays qu'avec un visa de sortie nécessitant l'accord de l'employeur.

Le système de Kafala "favorise les abus et l'exploitation", déplore James Lynch, d'Amnesty International.
Il permet en outre un juteux trafic de visas au profit des ressortissants des riches monarchies du Golfe dont les étrangers représentent environ la moitié des quelque 47 millions d'habitants.

M. Lynch explique que "si des immigrés se rendent compte qu'ils ont été trompés sur les termes et les conditions de travail lors de leur recrutement, ou qu'ils sont soumis à des conditions de travail ou de vie abusives par leur employeur", ils ne pourront changer d'emploi sans l'autorisation de leur parrain.

Zahir Belounis a été bloqué pendant 17 mois au Qatar en raison d'un conflit salarial avec son club qui lui refusait une autorisation de quitter le pays.

Il a dû signer "une lettre de licenciement anticipé" pour pouvoir regagner la France où il va selon son avocat porter plainte contre son parrain.

Deux autres Français, l'entrepreneur Jean-Pierre Marongiu, 52 ans, et l'homme d'affaires Nasser Al-Awartany, restent bloqués au Qatar.

Cette monarchie riche en gaz, qui doit accueillir la Coupe du monde de football en 2022, a été critiquée par les ONG des droits de l'Homme pour les conditions de travail des ouvriers immigrés employés sur les chantiers du mondial et pour le système de Kafala.

Sur la défensive, le Qatar a promis d'enquêter et de reconsidérer ses lois, mais sans évoquer le système de Kafala.

Souffrir en silence

Si les cas des trois Français ont été médiatisés, d'autres expatriés souffrent en silence.

"Ma petite soeur est décédée à Gaza cet été, mais je n'ai pas pu obtenir de visa de sortie à temps pour assister aux obsèques", dit Mahmoud Abdel Rahim, un employé palestinien établi en Arabie saoudite.

"L'impact du système de parrainage peut être particulièrement grave pour ceux ayant des emplois faiblement rémunérés, qui éprouvent des difficultés à faire valoir leurs droits", indique M. Lynch, chercheur spécialisé dans les affaires des immigrés dans le Golfe.

Il se référait aux ouvriers du bâtiment et domestiques, majoritairement asiatiques, qui forment les gros contingents des immigrés dans les pays du Conseil de Coopération du Golfe (CCG, Arabie saoudite, Qatar, Emirats arabes unis, Bahreïn, Oman, Koweït).

"Les domestiques s'exposent à des risques particuliers d'abus car dans la plupart des pays du CCG ils sont exclus de la protection des lois du travail", selon lui.

Les employeurs n'hésitent pas à confisquer les passeports, de retenir les salaires et de forcer les immigrés à travailler contre leur volonté, a dénoncé Human Rights Watch (HRW).

Nouvelle forme d'esclavage

En Arabie saoudite, le défenseur des droits de l'Homme Walid Aboulkheir affirme à l'AFP que le système de parrainage est "une nouvelle forme d'esclavage" qui "doit être abolie".

Les dispositions de la Kafala sont d'ailleurs à l'origine des difficultés que rencontrent de nombreux expatriés pour régulariser leur situation dans le royaume, où une vaste campagne contre l'immigration clandestine est menée depuis novembre.

Si Bahreïn reste le seul pays du CCG à avoir aboli ce système, certains pays voisins ont pris, souvent sous la pression des ONG, des mesures pour améliorer les conditions des immigrés.

Aux Emirats comme au Koweït, la loi interdit d'empêcher un employé de quitter le pays, sauf en cas de décision de justice, de confisquer son passeport ou de retenir son salaire, selon des militants des droits de l'Homme.

Aux Emirats, "un travailleur étranger peut aussi changer de parrain, sous conditions", a indiqué Mohamed Salem al-Kaabi de l'Association des Emirats pour les droits de l'Homme.

Une disposition similaire existe au Koweït mais "les pays du CCG ne respectent pas les accords internationaux sur la protection des travailleurs, dont ils sont signataires", a souligné Mohamed al-Humaidi, directeur de la Kuwait Association for Human Rights.

05 déc 2013, Taieb MAHJOUB

Source : AFP

 

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