vendredi 5 juillet 2024 00:28

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Migrations : de profonds bouleversements à venir

Selon Catherine Wihtol de Wenden, spécialiste des migrations internationales, les flux migratoires vont s'accentuer dans le sens nord-sud, mais aussi entre pays du sud.

Aujourd’hui, on compte, selon l’ONU, 232 millions de migrants internationaux sur la planète, 125 millions se dirigeant vers le nord (sud-nord et nord-nord) et 110 millions vers le sud (sud-sud et nord-sud). Ces mouvements migratoires représentent aujourd’hui pourtant seulement 3,2% de la population mondiale. Les flux de migrants internes sont trois fois plus nombreux : 740 millions. Cette évolution incessante va connaître de profonds bouleversements à l’horizon 2030, qui seront éventuellement accompagnés d’une plus grande liberté de circulation dans les espaces migratoires régionaux.

Tout d’abord, les migrations sud-sud vont croître sensiblement dans les années à venir, car les pays émergents (Brésil, Inde, Chine) vont continuer à attirer de nouveaux venus pour exploiter leurs ressources, surtout quand ce sont des pays peu peuplés (comme le Golfe). Les frontières sud-sud sont plus faciles à franchir pour les migrations clandestines et pour les personnes moins pourvues de ressources économiques, linguistiques et familiales que les frontières sud-nord, assorties de visas, de contrôles à distance et d’instruments militarisés de contrôle.

Les crises sont porteuses de mouvements de réfugiés qui vont accroître ces migrations de voisinage du sud au sud. Le changement climatique va aussi les alimenter, de façon moins importante cependant que les migrations internes de déplacés environnementaux sur la moitié sud de la planète. Les experts du climat prévoient 150 à 200 millions de déplacés environnementaux d’ici la fin de ce siècle. Les plus pauvres demeurent peu mobiles pour la traversée des frontières, faute de savoir-faire migratoire, mais de nouvelles couches de populations vont se mettre en route d’ici trente ans. Un autre facteur de migrations sud-sud va s’accroître en Asie : les migrations de mariage transfrontalières, du fait des politiques de sélection du sexe à la naissance et du manque de femmes dans certains pays.

Les diplômés du nord se tourneront vers le sud

Les migrations sud-nord, majoritaires pour l’instant, vont prendre un autre profil car beaucoup de pays du sud qui les alimentent sont en transition démographique, étant passés brutalement de 6 à 2,5 enfants par femme en une seule génération. Les migrants sud-méditerranéens de demain seront donc moins nombreux dans leur classe d’âge «jeune», plus urbains et plus scolarisés. En revanche, l’Afrique sub-saharienne va continuer à alimenter les migrations du fait de son jeune âge et de sa croissance démographique soutenue. Dans le même temps, la Chine va commencer à vieillir alors que l’Inde sera le pays le plus peuplé du monde, avec de lourds écarts entre riches et pauvres. Des pays devenus pays de transit comme le Mexique, le Maroc ou la Turquie vont abriter des flux venus de plus au sud. Les migrants dotés de la double nationalité, de capital ou exemptés de visas dans des espaces migratoires régionaux pourront s’installer dans la mobilité comme mode de vie.

Quant aux migrations nord-sud, deux facteurs les sous-tendent : le «dévieillissement» des populations occidentales et au Japon, qui se traduit par une espérance de vie accrue et en bonne santé par rapport à la génération précédente au même âge. Le tourisme international, qui atteint déjà un milliard d’adeptes aujourd’hui, va se poursuivre, se transformant de plus en plus en installation des seniors au soleil (Mexique, Caraïbes, Brésil, Maghreb, Europe du sud, Inde, Thaïlande…). L’autre facteur est la crise des économies européennes, où les jeunes, même diplômés, peinent à trouver un emploi et vont chercher du travail dans certains pays du sud dotés de matières premières ou d’infrastructures à développer…

Les migrations nord-nord, du fait de la crise européenne et de la mobilité accrue des populations occidentales, vont continuer à rendre les pays du nord attractifs pour les jeunes diplômés d’Europe du sud et de l’est les plus frappés par la crise : Etats-Unis, Canada, pays européens du nord et de l’ouest.

La mondialisation et la régionalisation des flux migratoires, en cours, vont s’accentuer, mettant au cœur de l’actualité la question du vivre ensemble.

21 mars 2014

Source : Libétation.fr

samedi 22 mars 2014

 

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