jeudi 4 juillet 2024 06:23

picto infoCette revue de presse ne prétend pas à l'exhaustivité et ne reflète que des commentaires ou analyses parus dans la presse marocaine, internationale et autres publications, qui n'engagent en rien le CCME.

Stupeur et pleurs des pêcheurs face aux bateaux de migrants au large de l'Indonésie

Muchtar Ali a éclaté en sanglots quand il a découvert, au large des côtes indonésiennes où il jette d'habitude ses filets, un bateau de boat people dérivant en mer depuis plusieurs jours et devenu emblématique de la crise des migrants en Asie.

"J'étais sans voix", explique le pêcheur à l'AFP, se souvenant du moment où il a aperçu le bateau surchargé, avec plus de 400 personnes à bord. Parmi eux, des hommes, des femmes et des enfants de la minorité musulmane rohingya de Birmanie, considérée par l'ONU comme l'une des plus persécutées au monde.

"En regardant ces gens, mes amis et moi nous sommes mis à pleurer, ils avaient l'air si affamés, si maigres", ajoute ce pêcheur de la province d'Aceh.

L'angoisse autour de ce bateau aperçu jeudi dernier, dérivant à proximité des côtes thaïlandaises, avait augmenté ces derniers jours, en l'absence de contact.

Ces boat people étaient devenus emblématiques de la question des migrants en Asie du sud-est, venant par milliers de Birmanie et du Bangladesh, et se retrouvant à la dérive après avoir été abandonnés en mer par leurs passeurs.

"Nous devons aider nos frères musulmans. Comment pouvons-nous ne pas aider des gens dans un tel dénuement? Ce serait un grand péché", ajoute le pêcheur indonésien. Face à l'émoi international, la Malaisie et l'Indonésie ont annoncé mercredi qu'elles cesseraient de refouler les bateaux.

Ce bateau s'était retrouvé au centre de l'attention internationale après la diffusion d'images de journalistes de l'AFP prises jeudi dernier en mer, au large de la Thaïlande.

On y voyait la marine thaïlandaise larguer par hélicoptère des vivres aux passagers affamés et assoiffés avant d'escorter le bateau hors de ses eaux. Certains passagers, très maigres, se jetaient par-dessus bord pour manger à même la mer les nouilles désydratées larguées.

Depuis, personne n'avait revu l'embarcation.

L'AFP a pu monter à bord du bateau, à son arrivée en Indonésie, et vérifier qu'il s'agissait bien de la même embarcation.

 'Epuisement total'

Les Rohingyas à bord, parmi lesquels 140 femmes et enfants, sont arrivés "dans un état d'épuisement total", confirme Chris Lewa, de l'organisation Arakan Project, qui tente de recenser les migrations de boat people.

Sur la base du témoignage de deux passagers, elle assure que le bateau a été chassé plusieurs fois des eaux thaïlandaises puis malaisiennes, avant de réussir à finir son odyssée vers l'Indonésie.

"La deuxième fois, les Malaisiens sont venus avec des armes et ont dit qu'ils tireraient sur le bateau s'ils revenaient", a-t-elle accusé, sans dire s'il s'agissait de la marine.

De leur côté, les autorités thaïlandaises s'étaient juste contentées de larguer quelques ballots de vivres et avaient insisté sur le fait que les passagers voulaient rejoindre la Malaisie.

Ce nouveau groupe de migrants secourus mercredi rejoint quelque 1.300 Rohingyas et Bangladais arrivés un peu plus tôt, eux aussi par la mer, au terme d'un voyage très dur.

Comme leurs voisins malaisiens, ils disaient être sans nouvelles du bateau depuis ce week-end, conduisant les organisations de défense des droits de l'Homme à dénoncer un "ping-pong humain".

Le bateau vert à double pont avait finalement été repéré mardi soir au large d'Aceh et les migrants évacués de leur embarcation en deux groupes, avant d'être conduits à terre tôt mercredi.

Le pêcheur Ali raconte comment les migrants ont "crié à l'aide" en voyant ses collègues arrivés en premier sur la zone mardi soir. Lui-même a pris une centaine de migrants à bord de son bateau. Il n'a pas pu en apprendre beaucoup sur leur odyssée en mer, ne parlant pas leur langue.

Les seuls mots échangés: "Musulmans, islam". Assez pour rassurer ces Rohingyas fuyant une Birmanie au nationalisme bouddhiste virulent.

20 mai 2015,Gianrigo MARLETTA

Source : AFP

Google+ Google+