jeudi 4 juillet 2024 20:12

Depuis près de quarante ans, le dogme de la fermeture des frontières structure les politiques publiques en matière d’immigration. L’Europe s’est cadenassée face aux migrants, tout en délégitimant toute alternative fondée sur la solidarité et les droits, jugée coupable d’irréalisme et de naïveté. Pour nous, l’état des lieux est sans appel : incapable de répondre aux objectifs qu’elle s’est donnée, cette politique inefficace provoque de surcroît des dégâts humains considérables et met en péril nos libertés.

En plaçant les migrants et leurs familles dans un dédale administratif et des  conditions de plus en plus inatteignables pour l’obtention d’un titre de séjour stable, ce sont des dizaines de milliers de sans-droits que la législation a créés, pour le plus grand profit de secteurs entiers de l’économie française qui peuvent ainsi utiliser une main-d’œuvre docile et bon marché. Peu à peu, en matière de santé, de protection sociale, de logement ou de formation, l’exclusion est devenue la règle, le droit l’exception.

Et pour ceux qui espéraient encore des conditions de vie différentes de celles qu’ils avaient fuies de leur pays d’origine, les objectifs chiffrés d’expulsion ont signifié un message clair : vivez cachés ou l’expulsion vous attend.

Les étrangers auront ainsi, depuis près de quarante ans, subi le sort souhaité à tous par les tenants du dogme libéral : déconstruire les droits pour en revenir au «tous contre tous», fonder les rapports humains sur la valeur marchande et la prédation, en finir avec les principes de solidarité, d’égalité, de justice. Construire une société de sans-droits.

Dans le même temps, le poison des vieux démons xénophobes et racistes n’en finit pas de prospérer sur le terreau de la désespérance sociale. La haine de l’étranger ou de l’autre continue plus que jamais à scander le rythme des discours politiques, détournant le regard des citoyens des enjeux autrement plus graves de sous-emploi, d’inégalités sociales et d’injustice fiscale. Dans ce contexte, l’intégration des immigrés est devenue une injonction généralisée, visant à discriminer les étrangers en s’appuyant sur l’argument de «l’assimilation» à de supposées «valeurs communes», qui ne sont que le masque d’un nationalisme d’exclusion.

Nous affirmons que notre conception du «vivre ensemble» n’est pas construite sur ces valeurs et qu’elle en est même aux antipodes. A la désespérance et la haine, nous opposons l’urgence d’un nouveau pacte citoyen qui nous rassemble en termes de droits comme d’obligations, quel que soit l’endroit où nous sommes nés.

C’est à la réalisation d’une politique d’hospitalité que nous appelons, en France comme en Europe. S’appuyant sur l’égalité des droits, la solidarité et l’ouverture au monde, cette politique doit promouvoir une véritable citoyenneté de résidence, afin d’en finir avec les discriminations légales et d’inventer un droit à la mobilité qui place au même rang l’intérêt des migrants et l’impératif des Etats de garantir la paix et la sécurité.

Réalisable, s’appuyant sur des propositions concrètes, cette politique d’hospitalité posera en actes une vision ouverte de l’avenir, considérant les migrants à l’égal de nous-mêmes, comme des êtres au parcours intelligible, acteurs du monde et parties prenantes de la solution aux défis de notre temps.

Signataires : Michel Agier ethnologue et anthropologue, Etienne Balibar philosophe, Pascal Blanchard historien, Claude Calame anthropologue et historien, Pierre Encrevé linguiste, Didier Fassin anthropologue et président du Comede, Nancy Green historienne, Rose-Marie Lagrave sociologue Olivier Mongin essayiste, directeur de la revue «Esprit», Gérard Noiriel historien, Jean-Pierre Olivier de Sardan ethnologue, Patrick Peugeot président de la Cimade, Jacques Rancière philosophe, Michel Wierviorka sociologue, historien Pierre Zaoui philosophe.

24/1/2012, Collectif de chercheurs

Source : Libération

Le Conseil constitutionnel examinera mardi matin en audience publique la possibilité dans le droit français de sanctionner d'une peine d'emprisonnement le séjour irrégulier, qui est contestée par plusieurs associations de soutien aux sans-papiers. ( © AFP Bertrand Guay)

Le Conseil constitutionnel examinera en audience publique la possibilité dans le droit français de sanctionner d'une peine d'emprisonnement le séjour irrégulier, qui est contestée par plusieurs associations de soutien aux sans-papiers.

Les Sages ont été saisis d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) -disposition qui permet à tout justiciable de contester une disposition législative- sur la pénalisation du séjour irrégulier, prévue par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda).

Cette QPC a été soulevée par Me Julien Gautier, avocat d'un ressortissant algérien qui a été placé en garde à vue à la fin août sur le fondement de l'article contesté (L.621-1 du Ceseda), puis en rétention administrative.

L'article contesté prévoit une peine d'emprisonnement d'un an et une amende de 3.750 euros pour un étranger pour le seul motif qu'il est en séjour irrégulier.

La Cour de cassation, qui a transmis la QPC au Conseil constitutionnel, a souligné que la rétention administrative de l'intéressé "a été précédée par une garde à vue qui n'aurait pu être ordonnée si le délit" qui lui est reproché "n'avait pas été puni d'une peine d'emprisonnement".

Plusieurs associations (Cimade, Gisti, SOS soutien aux sans-papiers) ont rejoint la procédure devant le Conseil constitutionnel.

Leurs avocats demandent aux Sages de déclarer cet article non conforme à la Constitution, et plus particulièrement à l'article 8 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen. Ce dernier dit que la loi ne doit établir que des peines "strictement et évidemment nécessaires".

Les avocats contestant cette disposition comptent s'appuyer sur deux arrêts rendus en 2011 par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), qui a jugé qu'un étranger en situation irrégulière ne pouvait être emprisonné au seul motif qu'il est en séjour irrégulier.

Pour Me Patrick Spinosi, avocat de la Cimade, le texte contesté "est d'ores et déjà invalidé par les décisions de la CJUE, et il appartient au Conseil constitutionnel de statuer en conséquence".

Les décisions de la CJUE ont donné lieu à des interprétations divergentes au sein des tribunaux français: certains ont jugé que le placement en garde à vue des clandestins était, du fait des arrêts européens, "irrégulier" et d'autres, à l'instar de la Chancellerie, qu'il ne l'était pas.

Me Spinosi et son confrère Henri Braun, avocat de SOS soutien aux sans-papiers, soulignent cependant que le débat sur ces gardes à vue ne sera pas tranché par la décision du Conseil constitutionnel, mais plus tard par la Cour de cassation, déjà saisie de pourvois sur cette question.

24/1/2012

Source : Libération/AFP

L’objectif de ce texte est de réfléchir sur les raisons de la nouvelle destination des immigrants notamment africains et maghrébins en provenance principalement des pays européens. Plutôt que de faire une approche comparative des modèles d’immigration, il serait peut-être plus pertinent de se questionner sur le phénomène de la deuxième émigration des travailleurs qualifiés et/ou étudiants étrangers faisant du Canada leur nouveau pays d’accueil et d’établissement.

L’immigration canadienne connaît de plus en plus de succès auprès des candidats potentiels à la migration internationale. L’année 2010 constitue une année record pour l’immigration aussi bien au niveau fédéral que provincial. En 2010, le Canada a accueilli 280 636 résidents permanents selon le rapport de Citoyenneté et Immigration publié en février 2011. La province québécoise a accueilli pour la même année 53 981 arrivants. Malgré la distance géographique, les températures et le climat canadien, la faiblesse des liens historiques entre le Canada et le continent africain (Maghreb et Afrique subsaharienne), pourquoi le Canada fait-il autant rêver des Africains et des Maghrébins? Dans un contexte de durcissement des conditions d’entrée et de séjour des étrangers dans la majorité des pays européens (France, Italie, Espagne, Belgique, Suisse etc.), le Canada devient-il par essence, par procuration ou par défaut un pays refuge?

Les universités et entreprises européennes forment des étudiants étrangers qui sont aussitôt recrutés par le Canada. L’immigration canadienne se démarque ainsi par un haut taux de scolarisation. L’Europe est devenue un tremplin des élites vers le Canada. Le Canada recrute ainsi des cerveaux qui ne lui ont rien coûté. Il profite de ce que nous appelons un produit fini dans le sens économique du terme ou un produit « clé en main ».

Une immigration permanente : un changement de statut et de paradigme

La plupart des immigrés africains et maghrébins (immigration non européenne) passent du statut d’étudiants étrangers en Europe à celui de travailleurs qualifiés, une catégorie économique de l'immigration canadienne. Le changement de statut entraîne par conséquent une différence fondamentale dans les paramètres d’accueil et d’intégration des nouveaux arrivants. En effet, les immigrants qui ont choisi le Canada sont entrés dans ce pays par des voies légales et normales en établissant un solide dossier leur permettant d’être sélectionnés parmi les meilleurs profils. Il faut préciser sur ce point que certains acteurs sociaux, politiques et économiques, notamment au Québec, demandent de plus en plus une meilleure évaluation de la grille de sélection en vue d’assurer une adéquation efficace entre les compétences des immigrants et les besoins réels de main-d’œuvre. Au Canada, les travailleurs qualifiés tout comme les étudiants étrangers ne sont pas confrontés à un système de changement de statut qui peut durer plusieurs années, contrairement à une situation souvent observée en Europe. Par exemple en France, et plus particulièrement sous des gouvernements de droite, un stress quotidien habite les demandeurs de changement de statut qui ne sont pas assurés de pouvoir résider sur le territoire même s’ils décrochent un contrat validé par l’employeur ( « circulaire du 31 mai relative à la maîtrise de l’immigration professionnelle »). Selon la chaîne de télévision française France 24, « le texte contesté [de Claude Guéant, ministre de l’Intérieur français] demande aux préfets d'instruire "avec rigueur" les demandes d'autorisation de travail des étudiants, et d'exercer un "contrôle approfondi" des demandes de changement de statut des étudiants étrangers. »

Même si la Circulaire Guéant a été récemment modifiée pour des raisons de maintien de «compétitivité des entreprises françaises (dans certains domaines nécessitant des compétences spécifiques de haut niveau)» et/ou des risques d’une image négative sur «l'attractivité du système d'enseignement supérieur [français] » , il demeure que les tracasseries administratives pour le renouvellement du titre du séjour ainsi que le «changement de statut d’étudiant étranger à salarié» irritent plusieurs diplômés étrangers originaires des pays colonisés. Tandis que le droit de résidence au Canada et la citoyenneté au bout de trois ans effectifs sur le territoire canadien placent les immigrants dans une position confortable. Le Canada étant par essence un pays d’immigration, il n’adopte pas des lois strictes et controversées sur l’immigration. La mentalité des Canadiens et leur vision positive de l’immigration sont complètement différentes de celles de certains Européens même si la politique canadienne d’intégration des immigrants n’est pas exempte de critiques. Des termes de délit d’immigration n’existent même pas ou presque pas dans le vocabulaire canadien contrairement aux pays cités plus haut.

Le Canada, une alternative au désenchantement sur l’Europe

Le Canada est le pays qui a été le plus épargné par la récession de 2008, ce qui confirme la solidité du modèle économique. La santé financière canadienne offre des possibilités d’intégration pour la catégorie de travailleurs qualifiés surtout ceux appartenant à des métiers techniques et spécialisés. Le Canada, contrairement à la France et l’Italie, n’est pas encore un pays saturé en matière d’immigration. Certains pays d’immigration à l’image de la France estiment avoir atteint leur niveau d’immigration. Le Canada devient ainsi l’alternative de fait pour la mobilité internationale. Dans certains pays européens, les gouvernements dirigés par les partisans de la politique de droite, pour détourner les véritables enjeux de leur société, pointent du doigt l'immigration perçue comme la source de tous les maux de la société (Insécurité, délinquance, taux de chômage élevé de leurs citoyens, menace de l’équilibre social etc.). Les pays européens ne sont plus des pays d’immigration comme cela a été dans les années soixante où ils avaient besoin d’une immigration prolétarienne pour construire des routes, des ponts, des chemins de fers. La vieille Europe pense plus à trouver des solutions aux problèmes des travailleurs locaux qui sont confrontés à des chômages endémiques. Par exemple, la France qui accueille environ par an 200 000 étrangers (immigration légale composée de l’immigration familiale, l'immigration professionnelle, les étudiants et le droit d’asile) et reçoit sur son sol 200 000 à 400 000 clandestins (chiffres difficiles à évaluer) connaît un taux de chômage inquiétant. Si l’on en croit à la chaîne française France 24, « en octobre, le nombre de demandeurs d’emploi a battu un record depuis douze ans en s’élevant à 2 814 900 chômeurs.» Le célèbre journal français Le Monde nous apprenait qu’ « en 2010, l'immigration légale en France a augmenté d'environ 10,6 % en un an, à 188 780 arrivants, sous l'effet notamment d'une forte hausse du nombre d'étudiants, d'après des statistiques de FTA et de l'Office français de l'immigration (OFII). Ce chiffre global comprend l'immigration familiale (81 100 personnes, 4 % de plus qu'en 2009), l'immigration professionnelle (31 500 personnes, stable), le droit d'asile (10 340, stable) et les étudiants (65 840 personnes, en augmentation de 28,5 %). »

Une perception positive de l’apport des immigrants à la croissance et à la productivité des entreprises
En dépit de la non-reconnaissance des diplômes et des acquis par certains ordres professionnels et employeurs, le Canada reconnaît l’apport de l’immigration sur le plan économique, démographique, linguistique et socioculturel. Le Canada admet plus que n’importe quel pays au monde la valeur ajoutée de l’immigration. M. Lehouillier, le député libéral provincial de Lévis est d’avis que l’immigration est une valeur ajoutée et martèle cette vérité « (. ...) qu'on arrête de charrier au niveau de l'immigration, parce que, nous, on est conscients que l'immigration, c'est une force économique exceptionnelle pour le Québec. Alors, qu'en est-il des immigrants investisseurs? 3,4 milliards sont entrés au Québec depuis 2000 grâce aux immigrants, 350 millions investis dans des entreprises québécoises, 4 200 emplois créés dans les régions du Québec, 1 000 stages financés par des immigrants en entreprise.»

Le titre révélateur de La Presse canadienne du 14 avril 2010 « Le salut du régime de pensions passe par l'immigration » nous apprenait que « le ministre des Finances, Jim Flaherty, [avait] lancé des consultations pour réformer le régime de pensions. [Selon toujours, la Presse canadienne], le Canada devra accueillir environ 100 000 immigrants de plus par année pour accroître la productivité et aider à payer pour le régime de pensions, a estimé [le 13 avril] l'économiste en chef [Glen Hodgson] du Conference Board du Canada. » Cet organisme canadien spécialisé dans la recherche et l'analyse économique, ainsi que l'analyse des performances des politiques publiques avait organisé un sommet sur l’avenir des pensions. Les immigrants qui font partie de la solution de la croissance de la main-d’œuvre pourraient contribuer à l’économie canadienne en sauvant le système des retraites à condition qu’on utilise davantage leur plein potentiel. En clair, le sous-emploi des immigrants ne permet pas l’utilisation d’un plein potentiel.

L’immigration canadienne est un modèle inspirant certes mais l’intégration en emploi dans leur domaine de compétences des personnes immigrantes pourrait être nettement plus améliorée. L’immigration est à la fois un processus complexe, déchirant mais aussi porteur d’espoir. Les personnes immigrantes qui ont choisi le Canada ont décidé de traverser un continent avec en toile de fond plusieurs espoirs (meilleure prospérité économique, meilleur cadre de vie, meilleure éducation des enfants, meilleur espace démocratique, meilleur respect des libertés individuelles, etc.). Les étudiants étrangers choisissent également des universités qui ont une très bonne réputation. Les valeurs canadiennes et ou québécoises se traduisant entre autres, par l’idéal démocratique, la liberté d’expression, la liberté, la diversité, le respect réciproque, la possibilité de refaire une nouvelle vie, la réorientation de carrière, font partie, entre autres, des critères qui attirent de plus en plus d’immigrants. En plus de la qualité de la formation et des perspectives professionnelles, les étudiants étrangers comme les immigrants espèrent toujours que leur situation pourrait s’améliorer au Canada. La qualité de vie ainsi que la qualité des études canadiennes poussent les diplômés étrangers à choisir également le Canada dans l’espoir de changer de statut à la fin de leur formation ou à tout le moins de bénéficier d’une formation reconnue mondialement. Malgré la cherté des études comparativement à l' Europe, les diplômés internationaux décident de perfectionner leurs connaissances au Canada. Ce que le gouvernement fédéral actuel a compris. Selon la journaliste de La Presse Canadienne, Heather Scoffield, « le Canada aurait (…) l'intention d'accueillir davantage de «cols blancs» qui ont déjà vécu ou étudié au Canada. Cette catégorie a été créée en 2008 et le gouvernement conservateur croit qu'elle a réussi à attirer des immigrants qui s'intègrent facilement à la vie canadienne et se trouvent rapidement un emploi. Ottawa aurait ainsi l'intention d'accueillir l'an prochain 7000 immigrants de cette catégorie, soit le nombre le plus élevé jamais accueilli, mais une hausse modeste de 8 pour cent par rapport aux 6500 accueillis en 2011. Le ministre Kenney[…] a aussi créé une nouvelle classe d'immigrants, qui permettra à un millier d'étudiants internationaux au doctorat de devenir des résidants permanents par le biais du Programme fédéral des travailleurs qualifiés, en autant qu'ils aient complété deux ans d'études en vue de l'obtention de leur doctorat. »

La différence de vision entre l’Europe et le Canada se manifeste dans la politique d'attractivité des étudiants internationaux :

plus de 25 000 étudiants étrangers par année au Québec

Au moment où certains pays européens essaient de se débarrasser des étudiants étrangers, le Canada et en particulier le Québec leur font des yeux doux. Le Canada (5,5%) a certes un rattrapage à faire au niveau du recrutement des étudiants étrangers si l’on se fie au classement de « l'étude Regard sur l'éducation 2010 de l'Organisation de coopération et de développement économiques : États-Unis (18,7 %), le Royaume-Uni (10 %), l'Allemagne (7,3 %), la France (7,3 %) et l'Australie (6,9 %).»

En ce qui concerne la province de Québec, le programme de l’expérience québécoise (PEQ- étudiants étrangers et immigration temporaire), qui est en vigueur depuis le 14 février 2010 a délivré selon la ministre de l’Immigration et des Communautés culturelles, Kathleen Weil, « 3 452 certificats de sélection dans le cadre de ce programme, dont 1 256 à des étudiants étrangers et 2 196 à des travailleurs temporaires » . Le gouvernement provincial libéral a compris l’avantage du recrutement des étudiants étrangers pour la société québécoise (élargissement du réseau, bonne connaissance de la culture organisationnelle, adéquation compétences et exigences des employeurs etc.). Il est certain qu’en regard de la politique européenne actuelle sur le durcissement des démarches administratives et financières pour l’obtention du visa, le renouvellement des titres de séjour ou les difficultés de changement de statut des étudiants étrangers, la destination québécoise sera encore privilégiée par ceux-ci. Pascale Breton du journal La Presse confirme cette tendance: « La proportion d'étudiants étrangers a bondi de 40% dans les universités québécoises au cours des dernières années. (…) La présence d'étudiants chinois, entre autres, s'est accrue de 161% entre 2001 et 2009, révèlent des données compilées par la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec (CREPUQ). Les étudiants français, suivis de ceux des États-Unis, arrivent toutefois loin en tête. Une entente entre la France et le Québec, conclue il y a une quinzaine d'années, permet en effet aux étudiants français d'acquitter les mêmes droits de scolarité que les Québécois, au lieu des quelque 15 000$ par session (sic) généralement exigés aux étrangers. »

La journaliste Lisa-Marie Gervais, du quotidien indépendant Le Devoir soulignait dans un article «Portes ouvertes aux étudiants étrangers», la volonté du milieu de l’enseignement de cibler davantage le recrutement des étudiants internationaux : «(…) quelque 29 400 étudiants étrangers qui sont venus faire des études postsecondaires l'an dernier au Québec. C'est le double d'il y a cinq ans. Et cela ne s'arrête pas là. Les données préliminaires transmises par les différents établissements témoignent d'une forte augmentation de cette clientèle d'étudiants (non résidents) cette année, tant au cégep qu'à l'université. À telle enseigne que l'objectif de l'Initiative gouvernement-réseaux de l'éducation en matière de recrutement d'étudiants étrangers, établi en 2008, a été dépassé. Il est de 16 % alors qu'il était de 10 % sur trois ans. »

Les personnalités influentes qui sont favorables au recrutement massif des diplômés internationaux deviennent de plus en plus nombreuses. Le recteur de l’Université du Québec à Rimouski, Michel Ringuet, livrait une analyse pertinente sur la circulation des cerveaux (certains parleront de fuite des cerveaux) dans le cadre des audiences de la Commission de la consultation publique sur la planification de l’immigration au Québec pour la période 2012-2015. Selon lui, « la mobilité étudiante internationale (…) présente un énorme potentiel eu égard à l'immigration. De 2003 à 2008, cette mobilité a augmenté de 25 % mondialement parlant, atteignant 3 millions d'étudiants. Il y a 3 millions d'étudiants dans le monde qui circulent d'un pays à l'autre. Et, selon l'UNESCO, cette mobilité atteindra 7 millions d'étudiants en 2020. Les principaux critères privilégiés par les étudiants en mobilité sont la notoriété du pays, la langue d'enseignement, le coût des études, la réputation de l'institution, la possibilité d'immigration versus la complexité d'obtention de visas et la sécurité. »

L’ex-directrice du défunt Conseil des relations interculturelles, Patricia Rimok, abondait dans le même sens : « En ce qui concerne le cas des étudiants étrangers, nous considérons que c'est une source de croissance économique. En 2008, une étude identifiait le Canada comme l'un des pays de l'OCDE comptant le plus d'immigrants avec une scolarité universitaire, et ainsi la plus forte probabilité que des entrepreneurs immigrants créent des entreprises à succès. Le Québec fait bonne figure [poursuit-elle] quant à l'attraction des étudiants étrangers, une source importante de futurs entrepreneurs, si nous les incitons à s'établir avec leurs études. Environ 9 % des étudiants universitaires sont des étudiants étrangers, un tiers des étrangers qui viennent au Canada choisissent une université québécoise. [Mme Rimok exprime finalement son ardent souhait de voir le Québec poursuivre ses efforts dans le recrutement de la catégorie PEQ : - tout comme les étudiants étrangers, le Québec ne doit pas les [les immigrants investisseurs] laisser partir lorsque leur choix est de s'établir ailleurs que dans leur pays d'origine. »
Le Québec est gagnant sur toute la ligne avec le programme des étudiants étrangers qui confirme son rayonnement international. Il peut recruter les étudiants étrangers ayant un solide dossier et souligner leur intérêt à rester sur son territoire. Il pourra également bénéficier d’une bonne visibilité internationale. En clair, les étudiants étrangers deviennent des ambassadeurs du Québec à leur retour dans leur pays d’origine (transfert de connaissances et compétences, coopération interuniversitaire, possibilités de faire des affaires etc.). Le recrutement des étudiants étrangers est également une manne financière pour le gouvernement du Québec et les institutions d’enseignement. La journaliste Lisa-Marie Gervais est du même avis: « Il est vrai que les étudiants étrangers rapportent. Ils paient des droits de scolarité supérieurs — de 12 084 à 14 978 $ au total pour les universitaires étrangers et de 8000 à 15 000 $ pour les cégépiens, selon les programmes —, mais surtout, ils consomment. Selon une récente étude de la firme Roslyn Kunin and Associates, les étudiants étrangers génèrent 6,5 milliards de retombées économiques, dont environ un milliard au Québec. »

La comparaison du modèle d’immigration du Canada (Plus de 34 millions d'habitants) se fait souvent avec l’Australie (environ 18 millions d’habitants) et certains acteurs invitent même le Québec (8 millions d’habitants) à s’inspirer de plusieurs politiques de l’Australie pour son mode de sélection des travailleurs qualifiés et des travailleurs temporaires, sa politique d’attraction et de rétention des étudiants étrangers et des immigrants investisseurs, etc.

Sur le plan ethnoculturel, le recensement de 2006 indiquait la présence de plus de 215 origines ethniques au Canada. Ce qui prouve que ce pays considéré par certains comme le « Nouveau Monde » est multiculturel. La proportion de personnes nées à l’étranger qui est très élevée démontre la diversité ethnique de la population. Au Canada, une personne sur trois est d’une origine ethnique autre qu’anglaise ou française. « Démographie canadienne-Fort taux d'immigrants » (19,8 % de la population canadienne est née à l'étranger. Ce taux classe le Canada au deuxième rang des pays les plus multiculturels, derrière l'Australie, mais devant les États-Unis. Aux antipodes, 22,2 % de la population australienne est née à l'étranger tandis que chez nos voisins du Sud [États-Unis], cette proportion tombe à 12,5 %, conclue Radio-Canada.) Les projections démographiques d’ici 2031 annoncent une diversité ethnoculturelle encore plus grande de la population canadienne. Selon Statistique Canada, les groupes de minorités visibles représenteraient 63 % de la population à Toronto dans la province ontarienne, 59 % à Vancouver dans la province de la Colombie-Britannique et 31 % à Montréal pour le Québec.

En définitive, les Néo-Canadiens apprécient à sa juste valeur le fait que la population locale ne leur demande pas continuellement la date de retour définitif dans leurs pays d’origine, de croire en un avenir radieux pour leurs enfants et le fait d’être considéré comme citoyen à part entière. Les diplômés étrangers originaires des pays colonisés par la France et la Belgique préfèrent braver le fameux froid canadien (le choc thermique) au lieu d’être systématiquement pointés du doigt. Le durcissement des conditions d’entrée des immigrés, le discours anti-immigrés, la propagande de la droite populiste, la peur et la stigmatisation des minorités, la banalisation du racisme dans les pays européens inciteront davantage les immigrants à choisir le Canada comme pays d’installation participant ainsi au « mythe canadien ».

L’émission Un œil sur la planète de France 2 animée par Thierry Thuillier dont le thème était « Pourquoi le Canada fait-il rêver? » a beaucoup contribué à renforcer la destination Canada. Cette émission est de notre point de vue, l’un des meilleurs reportages sur le choix du Canada par les immigrants. À travers différents reportages (Le paradis de l’immigration?, Le nouvel eldorado?, Le modèle canadien, Nos cousins d’Amérique), cette émission décrit en effet, avec objectivité et sans complaisance, les opportunités économiques, la richesse de la diversité, les limites du multiculturalisme, les lacunes du système de santé, la dualité Canada-Québec tout comme la face cachée de l’immigration canadienne ou le mirage canadien.

23/1/2012, Doudou SOW

Source : Dakaactu

La Libye et l'Italie ont signé samedi un nouveau pacte devant servir de "cadre politique" à leurs relations après la chute de Mouammar Kadhafi, à l'occasion de la première visite du chef du gouvernement italien Mario Monti à Tripoli.

La "déclaration de Tripoli" vise à "ouvrir de nouveaux horizons pour la coopération" entre les deux pays, à "renforcer leur amitié et leur coopération dans le cadre d'une nouvelle vision des relations bilatérales (...) et dans le respect de la souveraineté nationale", selon le texte de l'accord obtenu par l'AFP.

D'après une source diplomatique italienne, il s'agit d'un "cadre politique" destiné à définir les relations entre les deux pays après la chute de l'ancien régime libyen.

Pour sa première visite en Libye, M. Monti est arrivé à la tête d'une importante délégation, comprenant ses ministres des Affaires étrangères et de la Défense ainsi que le patron du géant pétrolier italien ENI, Paolo Scaroni.

Ce dernier a indiqué que la compagnie était presque revenue à son niveau de production d'avant-guerre en Libye, avec 270.000 barils par jour actuellement contre 280.000 avant la révolution.

L'Italie, ancienne puissance coloniale en Libye, est le premier partenaire commercial du pays.

"La relation amicale entre l'Italie et la Libye restera comme elle est, nous essaierons même de trouver des moyens pour l'approfondir", a déclaré le Premier ministre libyen Abdel Rahim al-Kib lors d'une conférence de presse conjointe.

"L'Italie est un partenaire important, qui a eu un rôle essentiel dans l'économie libyenne. Nous croyons que la relation entre la Libye et l'Italie ne peut être que forte, tant que nous sommes d'accord sur le fait qu'elle respecte la souveraineté nationale et les accords internationaux", a-t-il ajouté.

M. Monti a pour sa part affirmé que son pays était prêt à assister la Libye dans "sa reconstruction et sa stabilisation démocratique".
Il s'agit "de ne pas considérer la Libye seulement comme un marché" mais d'oeuvrer "à une collaboration véritablement réciproque", a-t-il ajouté.

"Nous sommes prêts à réactiver notre coopération dans la lutte contre l'immigration illégale", a-t-il ajouté.

M. al-Kib a précisé qu'une lettre d'intention avait été signée entre les deux pays, selon laquelle l'Italie aidera la Libye à protéger ses frontières.

En signe de bonne entente, M. Monti a remis à son homologue libyen une tête de statue romaine datant du 1er siècle après J-C, volée à Sabratha, un site archéologique situé à l'ouest de Tripoli, et retrouvée selon lui par la police italienne.

Il n'était pas clair dans l'immédiat si la "déclaration de Tripoli" va remplacer le traité d'amitié signé en 2008 entre le colonel Kadhafi et le chef du gouvernement italien de l'époque, Silvio Berlusconi.

"Nous l'avons laissé de côté", a dit à l'AFP M. al-Kib après la conférence de presse, en réponse à une question sur le sort du traité d'amitié, suspendu fin février après l'insurrection en Libye.

"L'un des articles du traité dit qu'il est possible de (le) réexaminer. La Libye a changé. Une seule personne a signé le traité", a-t-il ajouté, en référence à Mouammar Kadhafi, tué en octobre.

Le traité prévoyait des investissements italiens en Libye de 5 milliards de dollars en compensation de la période coloniale, dont la construction, pour environ 3 milliards de dollars, d'une autoroute littorale de 1.700 km.

En contrepartie, le régime de Tripoli s'était engagé à limiter l'immigration clandestine depuis ses côtes. Le traité, qui permettait également le refoulement en Libye des migrants partis de ce pays, avait conduit à une chute de 94% de l'immigration illégale vers le sud de l'Italie.

En décembre, la Libye avait exprimé des réserves sur "certains points" du traité.

Par ailleurs, à Benghazi (est), des inconnus ont jeté une grenade artisanale sur les locaux du Conseil national de transition (CNT) sans faire de dégâts ou de victimes.

21/01/2012

Source : AFPF

Une trentaine de films traitant des phénomènes migratoires seront projetés, du 8 au 11 février prochain, au 9e Festival "cinéma et migrations", prévu à Agadir (600 km au sud de Rabat), ont annoncé les organisateurs.

Les cinéphiles auront ainsi l'occasion d'apprécier, entre autres, "Notre étrangère" de la Franco-Burkinabée Sarah Bouyain, "Illégal" du Belge Olivier Masset-Depasse, "Andalousie Mon amour!" du Marocain Mohamed Nadif et "Beur sur la ville" du Franco-algérien Djamel Bensalah.

Présidée par l'écrivain marocain Tahar Benjelloun, l'édition de cette année aura pour thème principal la migration dans toutes ses dimensions abordée dans ses différentes sensibilités et sous des regards multiples qui reflètent l'universalité du phénomène.

Le festival proposera, par ailleurs, quelques films italiens à succès traitant de la même thématique comme "L'Orchestra" d'Agostino Ferrente, "The Golden Door" d'Emanuele Crialese et "Lamerica" de Gianni Amelio.

Organisé par l'association marocaine "Initiative culturelle" en collaboration avec le Centre cinématographique marocain (Ccm), le festival rendra cette année hommage à plusieurs artistes dont le chanteur, auteur-compositeur et acteur marocain, Younes Migri.
En 2011, le festival avait rendu hommage au réalisateur algérien Mahmoud Zemmouri en projetant son film "Beur, blanc, rouge" (2006), un film sur la question de l'identité et de la double culture chez les jeunes issus de l'immigration.

 22/01/2012

Source : Agence de presse algérienne (APS)

Le 8 décembre 1975, jour de la fête de l’Aïd-El-Kebir (communément appelée fête du sacrifice), le gouvernement algérien avec, à sa tête le président Houari Boumediene, ordonne l’expulsion des ressortissants marocains établis en toute légalité sur le territoire algérien depuis des décennies et ce en dépit :

- de la législation algérienne de l’époque sur les expulsions d’étrangers (ordonnance 66-211 du 21 juillet 1966 relative à la situation des étrangers en Algérie, complétée par le décret d’application 66-212 du 21 juillet 1966);

- et de l’adhésion de l’Algérie à la déclaration universelle des droits de l’Homme (article 11 de la Constitution algérienne de 1963).
Ces milliers de personnes (on parle de 45.000 familles et 350.000 personnes), intégrées depuis des années en Algérie, ont été expulsées du jour au lendemain, arbitrairement et sans sommation vers le Maroc. Cette opération était, selon les analystes et la presse de l’époque, une riposte politique à la monarchie marocaine qui avait mobilisé, quelques semaines auparavant, 350.000 Marocains pour une «Marche verte» afin de revendiquer le Sahara occidental.

Cette expulsion massive, que les expulsés nommeront plus tard «Marche noire», s’est muée rapidement en un véritable drame humanitaire. En effet, les Marocains furent renvoyés manu militari, abandonnant derrière eux famille, biens mobiliers, financiers et autres ... avec comme seul bagage les vêtements qu’ils avaient sur le dos. En plus de la perte de leurs biens mobiliers et financiers, ce déplacement forcé de population va profondément déchirer les familles mixtes (algéro-marocaines) car les autorités expulsent les ressortissants marocains du jour au lendemain, sans s’inquiéter de savoir s’il s’agit d’une mère ou d’un père que l’on sépare des siens ou d’un enfant qui se retrouvera seul.

Les autorités marocaines, peu préparées pour répondre à l’afflux massif des expulsés d’Algérie, dressent, à la hâte, des camps de tentes à proximité de la ville frontalière, Oujda. Ces abris de fortune et des conditions de vie extrêmement précaires furent leur lot durant des semaines, des mois, voire plusieurs années pour les moins chanceux d’entre eux.

Ces milliers de refoulés ne pouvant être contenus dans la seule ville d’Oujda furent déplacés vers d’autres contrées du Maroc. Les familles des refoulés d’Algérie, déchiquetées du jour au lendemain dans leur tissu familial, social, relationnel et dépossédées de leurs biens, ont aussi été très mal reçues par les populations locales qui voyaient d’un mauvais oeil ces nouveaux « immigrés » dont c’était souvent le premier contact avec leur pays d’origine.

Pendant des décennies, les personnes qui ont vécu cette tragédie, et devant recommencer leur vie à zéro, se sont tues. On peut supposer que ce silence était lié d’une part, à l’impact de l’humiliation qu’ils ont subie et d’autre part, au manque de bagage intellectuel et culturel dont ils disposaient pour pouvoir se défendre. En effet, rappelons que l’immigration des Marocains vers l’Algérie a débuté au début du XXème siècle et plus particulièrement lors de la période de l’Algérie française.
Plusieurs décennies après les faits, la question des expulsés d’Algérie, portée au niveau international par la société civile marocaine, a commencé à être évoquée dans les médias marocains et plusieurs émissions comportant des témoignages de personnes directement touchées par ces événements ont été diffusées. Les associations de victimes tentent de sensibiliser davantage la communauté internationale au travers de courriers et de communiqués mais aussi en intervenant publiquement lors de réunions du Conseil des droits de l’Homme de l’ONU et du Comité pour la protection des travailleurs migrants et de leur famille (CMW). Les associations concernées ont trouvé un écho auprès du Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et de leurs familles, qui a formulé des recommandations lors de l’Examen périodique universel de l’Algérie en avril 2010. En effet, le Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, lors de la séance tenue le 30 avril 2010, examinant le rapport initial de la République algérienne démocratique et populaire, adoptait les observations finales suivantes :

- le Comité prend note de l’information concernant l’article 42 de la loi de finances pour 2010 adoptée par l’État partie, qui permet d’exproprier de manière définitive des biens abandonnés. Tout en prenant note de l’explication fournie par la délégation de l’État partie selon laquelle cette disposition ne s’applique pas aux travailleurs migrants expulsés et de son avis quant à la non-rétroactivité de la Convention, le Comité est préoccupé par le fait que la mise en oeuvre de cette disposition pourrait donner lieu à l’expropriation de biens légitimes de travailleurs migrants expulsés, notamment les travailleurs migrants marocains expulsés par l’État partie par le passé;

- le Comité a reçu des informations selon lesquelles plusieurs anciens travailleurs migrants marocains continuent d’être séparés de leur famille suite à leur expulsion collective par le passé.

Ces observations sont, par ailleurs, assorties des recommandations suivantes :

- le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour restituer les biens légitimes des travailleurs migrants expulsés, notamment les travailleurs migrants marocains expulsés par le passé, ou de leur offrir une indemnisation juste et adéquate, conformément à l’article 15 de la Convention;

- le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures appropriées pour faciliter la réunification de ces travailleurs migrants marocains avec leur famille restée en Algérie.

Aujourd’hui, les enfants et petits-enfants ayant vécu cette expulsion, en direct ou en différé, veulent savoir ce qui s’est passé. Une interrogation légitime fondée sur le devoir de mémoire et la construction identitaire. C’est dans ce but que depuis 2005, plusieurs associations de Marocains expulsés d’Algérie (Insaf, Admea, Amveaa, etc.), se sont créées au Maroc, en France, en Belgique et ailleurs. Des milliers de personnes veulent tenter de comprendre et de reconstituer les morceaux d’une histoire trop vite oubliée, d’une page sombre, tournée sans être lue.

Cette démarche veut répondre à un questionnement légitime afin de savoir ce que leurs proches ont vécu après avoir été brisés dans leur quotidien.

Ces personnes veulent découvrir ce que sont devenues les familles séparées, comment elles ont assumé leur subsistance alors qu’elles étaient privées de toute ressource matérielle et financière, ce que sont devenus les enfants dont on a brutalement sectionné la scolarité.

Il s’agit également de s’inscrire dans une perspective de travail historique, de réhabilitation de la dignité de milliers de personnes et aussi de vigilance afin que des épisodes aussi dramatiques que celui-ci (entre autres) ne se reproduisent plus jamais. Et bien que ce ne soit pas l’essentiel, il convient aussi de se pencher sur la question de la restitution des biens matériels laissés en Algérie par leur famille.

Au niveau du Maroc, plusieurs démarches ont aussi été effectuées. Ainsi, le 9 juin 2010, le gouvernement marocain a reconnu par la voix de Taib Fassi Fihri, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, qu’il devait porter ce fardeau de l’histoire avec les victimes et « déployer tous les efforts nécessaires en vue de rendre justice, soutenir et assister les Marocains expulsés d’Algérie et privés de leurs biens sans aucune considération humaine ou juridique ».

Par ailleurs, lors de rencontres bilatérales entre le Maroc et l’Algérie, respectivement en 1991 et en 2003, les deux parties avaient convenu de dresser les listes des personnes victimes d’expulsion arbitraire. À ce jour, ces discussions n’ont pas abouti, les relations entre les deux pays restent toujours tendues et leurs frontières terrestres fermées. Dans le cadre du Printemps arabe, il est encore plus essentiel de soutenir le Maroc et l’Algérie dans toute initiative visant à normaliser leurs relations, à rouvrir leurs frontières terrestres et à bâtir des relations bilatérales fondées sur la fraternité, la coopération et le bon voisinage.
Dans le cadre de ces futures discussions, il importe que la problématique des Marocains expulsés d’Algérie figure en ordre utile dans l’agenda politique.

En ce qui concerne le travail de mémoire, on sait que depuis 2004, le Maroc, par la voie de l’Instance Equité et Réconciliation (IER), a ouvert le dossier sombre des années de plomb. Il pourrait se plier au même exercice pour ce douloureux fragment de l’histoire. En effet, malgré toutes les limites que l’on peut imputer à l’IER, elle a eu le mérite de libérer la parole, de dire l’indicible, de penser et panser les plaies, de se diriger vers une sérénité individuelle et nationale. Dans le cas des Marocains expulsés d’Algérie, il s’agirait de leur ouvrir un espace pour leur permettre de se libérer de cette souffrance, non pas comme un exutoire mais bien comme une énergie positive au service de la construction de la mémoire et d’un avenir plus serein.

Proposition  de résolution

 Le Sénat,

A. considérant la Déclaration universelle des droits de l’Homme;

B. considérant la législation algérienne de l’époque sur les expulsions d’étrangers;

C. considérant l’article 22, alinéa 1er, de la Convention internationale sur la protection des droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille;

D. considérant les conclusions de la 10ème session du Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille chargé du suivi de la Convention, tenue du 20 avril au 1er mai 2009;

E. considérant la Convention relative aux droits de l’enfant;

F. considérant la Convention internationale sur l’élimination de toutes formes de discrimination raciale;

G. considérant la Convention internationale sur l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes;

H. considérant le pacte international relatif aux droits civils et politiques;

I. considérant que le gouvernement algérien a effectué des expulsions massives de près de 350.000 ressortissants marocains en décembre 1975;

J. considérant la plainte déposée par les associations des Marocains expulsés d’Algérie au Tribunal pénal international mettant  en lumière ces refoulements;

K. considérant les conclusions du rapport d’Amnesty international;

L. considérant les registres du Comité international de la Croix rouge (CICR);

M. considérant les déclarations du gouvernement marocain du 9 juin 2010,

Demande  au gouvernement

1) d’apporter son soutien moral aux victimes et aux associations des Marocains expulsés d’Algérie pour leur travail de construction de la mémoire contre l’oubli;

2) de demander la création, par l’Organisation des Nations unies (ONU), d’une commission spéciale pour enquêter sur les actes commis en 1975, déterminer les responsabilités et réparer le préjudice;

3) de soutenir les gouvernements marocain et algérien dans le processus de normalisation et de pacification de leurs relations mutuelles;
4) de recommander au gouvernement algérien :

a) d’entamer des enquêtes approfondies sur les expulsions massives qui ont eu lieu en Algérie en décembre 1975;

b) de prendre les mesures adéquates pour faciliter le regroupement des travailleurs migrants marocains expulsés avec leur famille restée en Algérie;

c) d’entamer un processus de restitution des biens des familles spoliées et de dédommagements moraux aux victimes;

5. de recommander au gouvernement marocain :

a) de soutenir les associations des Marocains expulsés d’Algérie;

b) de mettre sur pied un processus similaire à l’IER afin de recueillir les témoignages des victimes de l’époque ainsi que tout autre témoignage permettant d’éclairer les événements de 1975 (Croix rouge internationale, ...).

28 octobre 2011.

Fatiha SAÏDI - Hassan BOUSETTA - Philippe MAHOUX - Marie ARENA - Fabienne WINCKEL

21/1/2012

Source : Libération

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