Colloque international organisé en partenariat par le Conseil de la communauté marocaine à l’étranger (CCME), Le Centre Jacques Berque, l’Institut Français de Rabat, et la Bibliothèque Nationale du Royaume du Maroc (BNRM).
Les questions de l’altérité, de la coexistence et du « vivre ensemble » se réinvitent dans les pays du Sud de la Méditerranée. Elles s’y reformulent sous une perspective inédite dessinée par l’irruption de l’immigration dans des terres traditionnellement d’émigration. Ces questions stimulent et bousculent des reconstructions identitaires en œuvre où l’illusion d’un entre-soi identitaire national ou culturel est déjà largement fissurée par l’effet de processus de mondialisation qui traversent tous les secteurs de la vie de la région. Mais surtout, elles posent probablement les prémices de l’émergence d’une perspective cosmopolite dans une région d’où elle a été évacuée…Suite
Le partenariat migratoire conclu avec le Nigéria et les vols spéciaux constituent les thèmes principaux du rapport sur la migration 2010 publié par l’Office fédéral des migrations (ODM). Ce rapport donne, chiffres à l’appui, un aperçu des différentes activités de l’ODM. (Consulter le texte intégral du rapport)
26/5/2011
Source : Site de l’ODM
Depuis quelques semaines, le gouvernement a manifesté de façon récurrente sa volonté de réduire les flux migratoires. Au mois d'avril, le ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, déclarait vouloir «faire baisser le volume de l'immigration légale». Cette semaine, c'est à l'immigration de travail qu'il s'attèle. «Contrairement à une légende, la France n'a pas besoin de compétences issues de l'immigration, estime le ministre. Elle dispose de la ressource nécessaire» afin de pourvoir ses offres d'emplois et «n'a besoin ni de maçons ni de serveurs de restaurants». «Cela relève du bon sens», a surenchéri mardi le ministre du Budget, François Baroin. Un bon sens qui laisse cependant sceptiques nombre d'économistes.
«Sur le papier, il peut être séduisant de mettre face à face chômeurs et immigrés», explique Patrick Simon, démographe à l'Ined. Si le marché du travail français était exempt d'immigrés, cela ne ferait-il pas d'autant plus de postes à pourvoir pour les autochtones, dont le taux de chômage est l'une des préoccupations principales ? «C'est oublier que ces deux catégories de populations ne sont pas substituables», précise Patrick Simon. En clair, autochtones et immigrés n'occupent pas les mêmes types d'emplois, et se font peu concurrence. «Ils seraient plutôt complémentaires. Et à ce sujet, il existe un relatif consensus, affirme Xavier Chojnicki, économiste au Cepii et à l'Université de Lille 2. La plupart des études réalisées constatent d'ailleurs un très faible impact de l'immigration sur le taux de chômage».
«En France et en Europe, le marché du travail est très segmenté», poursuit-il. Les immigrés y occupent souvent des emplois peu qualifiés, peu rémunérés, aux conditions de travail difficiles. Les secteurs de la restauration, du bâtiment et des services à la personne par exemple, peinent malgré tout à pourvoir des offres d'emploi que les autochtones jugent insuffisamment attractives. D'après la dernière enquête sur les besoins de main d'œuvre réalisée par Pôle emploi, 61% des offres d'aides à domicile posent ainsi des difficultés de recrutement. «Si le flux d'immigration venait à être réduit, cela accroîtrait encore les difficultés d'embauche de ces secteurs», explique Xavier Chojnicki. Avec pour conséquence probable une forte hausse du travail au noir.
20.000 personnes par an
«De surcroît, vouloir réduire l'immigration de travail est surprenant, car elle comprend les migrants plus sélectionnés», s'étonne Patrick Simon. Ces 20.000 personnes par an qui viennent travailler en France à la demande des chefs d'entreprises ne représentent d'ailleurs qu'une petite fraction des 200.000 immigrés qui s'y installent chaque année, notamment au titre du regroupement familial ou pour motifs humanitaires. «Les employeurs espèrent plutôt un assouplissement des règles en vigueur car ils ont besoin de cette main d'œuvre étrangère», poursuit-il.
Depuis 2006 et jusqu'à il y a peu, Nicolas Sarkozy plaidait d'ailleurs pour une «immigration choisie», encourageant la venue de candidats sélectionnés selon leur profil professionnel. «Depuis cette date, l'immigration de travail est passée de 10.000 personnes par an environ à 20.000», précise Patrick Simon. Un nombre marginal par rapport aux 500.000 offres d'emplois non pourvues actuellement en France. «Au total, ce n'est pas beaucoup non plus par rapport au flux migratoire total», juge le démographe. Car la France, comme la plupart des pays européens, peine à faire venir sur son territoire les immigrés les plus attractifs. A ce titre, le Canada, l'Australie, ou encore les Etats-Unis tirent bien mieux leur épingle du jeu.
26/05/201, Marie Bartnik
Source : Le Figaro
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À l'occasion du 150e anniversaire de l'unité de l’Italie, notre maison d'édition a également voulu célébrer l'émigration italienne en lui consacrant un ouvrage complet, composé de nombreux témoignages et réflexions sur le sujet. Cette histoire trouve dans ce livre le lieu de sa reconnaissance, à une époque où la mémoire fait souvent défaut. Une histoire de l’émigration, vue de l’intérieur, par ceux-là mêmes qui l’ont faite. Une vision réaliste et sans complaisance, loin des clichés et de l’autocélébration. Laure Teulières coordinatrice de l’ouvrage auquel ont participé pas moins de 50 historiens et témoins, nous en parle.
À l’occasion du cent cinquantenaire de l'Unité, il semblait indispensable de souligner ce que l'émigration représente dans l'histoire italienne contemporaine.
Car avec près de 27 millions d'émigrants, la vie de la Péninsule doit beaucoup à cette Italia all’estero trop souvent passée sous silence. L'ouvrage est le résultat du travail et des échanges noués avec toute une palette d'auteurs spécialistes de la question (...), mais aussi des témoins pouvant transmettre leur expérience. (...)Un total de 500 pages pour parcourir plus d’un siècle d’histoire. Mais sur le mode du florilège.
ITALIENS 150 ans d'émigration réunit en effet des contributions d'une grande diversité présentant autant d’épisodes, de parcours, de portraits. Depuis les provinces de la Péninsule – Vénétie, Frioul, Trentin, Émilie, Sicile... – marquées chacune à sa manière par les aller-retours migratoires ou les départs définitifs ; jusqu’aux terres d’accueil en France et ailleurs. Des villes d'abord, où les immigrés ont pris place au sein de populations mêlées. Nice, bien sûr, avec entre autres singularités de n’avoir éte rattachée à la France qu'en 1860, mais aussi Grenoble ou Marseille, fort dissemblables et pourtant, l’une comme l’autre, villes italiennes. Dans la capitale, ce sont les quartiers populaires de La Villette, du faubourg Saint-Antoine ou la ceinture « rouge » de banlieue. Cette présence est aussi abordée à l'échelle régionale : la Lorraine et l’aventure des mineurs du fer, le Nord où tant d’Italiennes furent ouvrières du textile, le Sud-Ouest devenu dans les années 1920 une forte zone d'immigration rurale... et tant d'autres territoires dont on sait moins combien les Transalpins y ont fait souche, en Normandie, dans les Vosges ou en Franche-Comté. Quelques contrées plus lointaines – la Tunisie, le Luxembourg ou l’Amérique, jusqu’à l’étonnant petit village mexicain de Chipilo – élargissent la perspective.
L’univers du travail est au cœur des parcours des émigrés. Charbonniers toscans ou bergamasques, sidérurgistes, travailleurs du bâtiment, qui furent assurément un vecteur privilégié d’intégration, et d’autres milieux professionnels comme ceux de la restauration ou de la boutique... On verra aussi le cas particulier des paysans : comment les immigrants sont venus s’établir à la terre, prenant des fermes à l’abandon pour s’enraciner définitivement dans les terroirs occitans de Gascogne et du Midi toulousain. Un chapitre rappelle la place centrale des femmes dans l’émigration. Un autre ses aspects politiques autour de l'exil antifasciste de l’entre-deux-guerres. On trouve également des éléments de réflexion sur les mécanisme de la xénophobie à travers les conflits ouvriers de la fin du XIXe siècle – dont bien sûr la tuerie d’Aigues-Mortes en 1893.
Les lecteurs feront aussi leur miel des contributions sur le patrimoine culturel : le trésor des chants populaires ; la naissance du musette, emblématique d'un métissage musical réussi ; le cinéma et les images d’émigrants qui ont construit notre imaginaire...
L’italianité est explorée dans ses aspects littéraires ou architecturaux, comme à travers l’entrée plus prosaïque, mais ô combien fondamentale, des usages alimentaires. On peut y sentir, enfin, que la mémoire tient bon et se réinvente autour de ce passé, (…). C’est aussi par le prisme de la mémoire que l’on revient sur des événements qui ont cruellement marqué l’histoire de l’émigration : le drame d’Izourt en Ariège en 1939, et surtout la terrible catastrophe minière de Marcinelle en Wallonie en 1956. Plusieurs textes émanent d’émigrés ou de leurs descendants qui ont pris la parole pour dire cette histoire. C'est un choix tout à fait délibéré. Car les récits de vie sont une autre manière de comprendre les choses et d'en rendre compte. La palette a été voulue large : là encore, d’un Italien de la seconde génération ayant fait toute sa carrière dans les usines De Wendel à Hayange, à un autre formé au Petit Séminaire, ordonné prêtre en France, avant d’animer finalement la paroisse italienne de Toulouse. Il y a aussi l’exemple de cette femme, émigrée et paysanne, que tout dans sa condition prédisposait à être une « sans-voix » et qui se décida, l’âge venu, à rédiger un carnet autobiographique pour transmettre aux siens ce qui lui semblait essentiel. Par définition, les témoignages vécus racontent des tranches de vie personnelles. Beaucoup y retrouveront pourtant l’écho de leur propre aventure ou de celle de leurs aïeux. (…). Fille ou fils, petite-fille ou petit-fils d'émigrés, chacun nous livre une réflexion subtile sur la partenza, le déracinement, l’adaptation, les transformations et réinventions identitaires, les gestes et les habitudes où se niche encore l'italianité des vieux migrants (…). À feuilleter cet ouvrage kaléidoscope, on voit qu’il donne une place exceptionnelle aux photographies anciennes.
Ces sources ont en effet leur force propre et constituent une trace inestimable. (…)
La France a été façonnée par l’immigration depuis plus d’un siècle. Bon nombre de Français ont des origines étrangères. Après avoir longtemps été enfoui, négligé, le temps semble venu pour cet apport immigré de refaire surface. Le souci des racines, en ce sens, ne découle pas d’une démarche passéiste. C’est plutôt la reconnaissance de la richesse qu’il peut y avoir à se réclamer d’une double appartenance. Entre expatriation et enracinement, les émigrés-immigrés ont fait naître un lien franco-italien tout particulier. Et ce lien ne demande qu’à vivre.
D’autant que l’histoire semble aujourd’hui s’inverser sous nos yeux, et c'est cela aussi que nous avons voulu souligner dans un dernier chapitre. Les paquebots transatlantiques qui, au début du siècle passé, amenaient des cargaisons d’Italiens démunis tenter leur chance outremer ont laissé place aux périlleuses embarcations qui traversent la Méditerranée parce que d'autres jeunes cherchent à leur tour les moyens de vivre. Car c'est maintenant la Péninsule qui fait figure d'Eldorado pour des étrangers originaires des Balkans, du Moyen-Orient, d’Afrique ou d’ailleurs. À l’heure où l’Italie, après la France, est devenue terre d’accueil – et souvent d'ostracisme –, se souvenir du parcours des migrants d’hier importe aussi pour le présent.
Laure Teulières
Source : Radici
La situation continue d'être observée, a précisé le Secrétariat d'Etat à l'économie en publiant le 7e rapport de l'Observatoire de la libre circulation des personnes. Depuis l'entrée en vigueur de l'accord en 2002, les entreprises ont largement tiré parti des nouvelles possibilités de recrutement.
Avec un excédent de 67'000 personnes, le solde migratoire se situe toujours à un niveau élevé sur une comparaison à long terme. Environ 58% de l'immigration nette sont le fait de ressortissants de l'Union européenne (UE) ou de l'Association européenne de libre échange (AELE).
Suite à l'extension de l'accord en 2006, la proportion de travailleurs de l'Europe de l'Est a augmenté pour constituer l'an dernier 6% du solde migratoire total. L'emploi frontalier a également progressé plus que la moyenne, surtout dans l'arc jurassien, la région lémanique et au Tessin.
Selon le rapport, l'emploi des résidents n'en a guère souffert avec une croissance des embauches supérieure à la moyenne de 2001 à 2008. Ces dernières années, le chômage s'est toutefois développé davantage dans la région lémanique, l'arc jurassien et le nord-ouest de la Suisse que dans les régions non frontalières.
Dans leur grande majorité, les nouveaux arrivés de l'UE/AELE étaient qualifiés: 51% disposaient d'une formation tertiaire et ont constitué un apport bienvenu à la main-d'oeuvre indigène. La concurrence engendrée par l'immigration s'est globalement amplifiée, mais n'a pas constitué un facteur d'éviction des Suisses.
L'évolution supérieure à la moyenne des salaires s'est tassée un peu avec l'immigration. Mais les bas salaires ont évolué au même rythme que les salaires moyens.
L'immigration ralentit le viellissement de la population en Suisse. Les assurances du premier pilier (AVS/AI/APG/PC) en ont profité. Seule l'assurance chômage a vu ses coûts augmenter.
26.05.2011
Source : Tribune de Genève
Le secrétaire général de l'UMP, Jean-François Copé, a annoncé mardi 24 mai, que le parti présidentiel tiendrait, le 28 juin, une nouvelle convention thématique, consacrée à l'immigration. A l'instar de celles sur la justice, la laïcité ou l'emploi, ces réunions doivent servir de socle au futur programme de l'UMP pour 2012, et de son très probable candidat, Nicolas Sarkozy.
Début 2011, l'UMP attaquait ainsi par une convention sur la justice, quelques semaines après la polémique provoquée par les propos du président Sarkozy sur les défaillances de la justice dans l'affaire du meurtre de Laetitia, à Pornic. Début avril, le parti évoquait la laïcité lors d'une convention en forme de conclusion au sulfureux débat lancé sur le sujet. Puis ce fut l'emploi, début mai. Le 14 juin, un nouveau rendez-vous se penchera à la ruralité.
Selon l'UMP, contactée par Le Monde.fr, la convention du 28 juin devait initialement évoquer... le numérique. Elle sera finalement tournée vers l'immigration. Un sujet sur lequel la majorité semble opérer, depuis quelques semaines, un virage à droite et rompre avec le concept d'"immigration choisie" que prônait Nicolas Sarkozy.
CLAUDE GUÉANT À L'OFFENSIVE
A la manœuvre, Claude Guéant, ministre de l'intérieur, multiplie les sorties sur la nécessité de réduire l'immigration légale en France. Dimanche 22 mai, invité du Grand Rendez-vous Europe 1/Le Parisien, il a ainsi estimé que la France n'avait "pas besoin de maçons" immigrés car elle disposait de la "ressource nécessaire". Une déclaration qui lui a valu un tollé à gauche.
Mardi 24 mai, le porte-parole du gouvernement, François Baroin, a soutenu le ministre de l'intérieur, jugeant qu'il avait fait "un constat de bon sens". Pour le ministre du budget, "avant même de traiter la question du chômage, nous avons 100 000 personnes actives à absorber au titre de l'économie" et "naturellement, nous n'avons pas besoin d'une économie d'importation et donc d'une immigration économique" dans les métiers du bâtiment.
L'immigration économique, liée au travail, est évaluée à environ 20 000 personnes par an. Les professionnels des secteurs comme le bâtiment ou la restauration estiment généralement que cet afflux de travailleurs étrangers est nécessaire pour occuper des emplois à bas coût. Selon une récente étude de Pôle emploi, 37,6% des embauches projetées par les employeurs dans les secteurs de la restauration ou des services à la personne connaissent des difficultés de recrutement.
Au cours de la même émission, Claude Guéant a également jugé que "l'intégration ne va pas si bien que ça : le quart des étrangers qui ne sont pas d'origine européenne sont au chômage. Les deux tiers des échecs scolaires, c'est l'échec d'enfants d'immigrés". Les propos du ministre de l'intérieur ont provoqué l'indignation des associations de parents d'élèves. Face à celle-ci, Claude Guéant s'est dit mardi "étonné", jugeant "que [ses] propos sont tout le contraire d'une stigmatisation, mais le constat de difficultés dans notre politique d'intégration".
JEAN-FRANÇOIS COPÉ ET "L'IMMIGRATION SOCIALE"
Avec sa convention, l'UMP a décidé de poursuivre dans la voie de la stigmatisation de l'immigration. Et de donner une suite à l'initiative du ministre des affaires européennes Laurent Wauquiez qui, dans une charge contre le revenu de solidarité active (RSA) début mai, proposait de limiter l'accès des étrangers aux minima sociaux. Pour introduire son débat, Jean-François Copé a ainsi évoqué "la question de l'immigration non pas économique mais sociale". "Ça n'a rien à voir avec la xénophobie, c'est un problème comptable (...). Il y a un certain nombre de mesures à caractère social dont peuvent bénéficier les immigrés" que "nous ne pouvons pas financer", a-t-il lancé.
Le terme d'"immigration sociale", déjà employé par le même M. Copé fin avril, vise ici une immigration qui s'effectuerait dans le but de bénéficier des prestations sociales offertes par le pays d'accueil - une thèse par ailleurs réfutée par la plupart des spécialistes de la question. Ce thème était jusqu'ici plutôt utilisé par l'extrême-droite. Jean-Marie Le Pen parlait ainsi dans un discours, le 12 mars, de "95% d'immigration sociale".
Ce nouveau "débat" sur l'immigration arrive à point nommé pour calmer quelque peu la grogne des élus les plus à droite de l'UMP, regroupés au sein du collectif Droite populaire. Ces derniers sont à la pointe de la guerilla des parlementaires de la majorité contre la proposition gouvernementale de faire disparaître les panneaux avertisseurs de radars.
L'ancien porte-parole de l'UMP, Dominique Paillé, président de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii) et vice-président du Parti radical de Jean-Louis Borloo, a appelé le parti présidentiel à "se garder de toute dérive populiste" et à "ne pas donner l'impression d'aboyer avec les loups". Il a par ailleurs refusé de commenter les propos de Claude Guéant.
26/5/2011
Source : Le Monde.fr
Les membres du collectif antiraciste « D'ailleurs, nous sommes d'ici » sont les rédacteurs du numéro spécial de l'Humanité du vendredi 27 mai, à 24 heures de la grande manifestation du samedi 28 mai, contre le racisme, la politique migratoire du gouvernement et pour la régularisation des sans-papiers.
A 10 heures, ils étaient tous là pour la conférence de rédaction. Des membres de Solidaires, du collectif de sans papier de Vitry, des Amoureux au Ban Public… Une réunion chargée, propositions d’articles et de réactions furent malheureusement trop nombreuses pour les 32 pages de l’Huma du vendredi. Sans papiers, RSA, mariages gris, Guéant, éducation sans frontières… De nombreux thèmes seront abordés.
Olivier le Cour Grandmaison est enseignant chercheur en sciences politiques, est l’un des initiateur de l’appel contre le racisme, la politique d’immigration du gouvernement et pour la régularisation des sans-papiers. Appel qui a donné naissance au collectif « D'ailleurs, nous sommes d'ici » rassemblant de nombreuses organisations associatives et syndicales. Tous appellent à manifester ce samedi 28 mai. A Paris, le départ est prévu à 14h à Barbès-Rochechouart. Voir la carte des autres mouvements en France.
27/5/2011
Source : L’Humanité
Colloque international organisé en partenariat par le Conseil de la communauté marocaine à l’étranger (CCME), Le Centre Jacques Berque, l’Institut Français de Rabat, et la Bibliothèque Nationale du Royaume du Maroc (BNRM).
Les questions de l’altérité, de la coexistence et du « vivre ensemble » se réinvitent dans les pays du Sud de la Méditerranée. Elles s’y reformulent sous une perspective inédite dessinée par l’irruption de l’immigration dans des terres traditionnellement d’émigration. Ces questions stimulent et bousculent des reconstructions identitaires en œuvre où l’illusion d’un entre-soi identitaire national ou culturel est déjà largement fissurée par l’effet de processus de mondialisation qui traversent tous les secteurs de la vie de la région. Mais surtout, elles posent probablement les prémices de l’émergence d’une perspective cosmopolite dans une région d’où elle a été évacuée…Suite
Le zajal, cette forme de poésie exprimée en arabe dialectal marocain, a été à l'honneur lors d'une rencontre organisée, mercredi soir à Madrid, par la Fondation "Casa Arabe" (La Maison arabe), avec la participation des poètes marocains Mourad Kadiri et Ahmed Lemsyeh.
Cette rencontre a pour objectif de faire connaître, notamment auprès du public espagnol, cette expression poétique marocaine qui fait usage da la langue maternelle des Marocains et ce, à travers l'Œuvre de deux grandes figures de ce genre.
"Cette initiative est un hommage à la poésie marocaine qui a progressé et s'est affirmée, ces dernières années, dans les anthologies de la poésie mondiale et dans des rencontres et des festivals internationaux", a souligné Mourad Kadiri.
Il a expliqué que le choix de l'arabe dialectal marocain pour faire de la poésie est un moyen de confirmer que ce parler peut être utilisé sous une forme littéraire.
Cette rencontre, a-t-il ajouté dans une déclaration à la MAP, est "une confirmation que le zajal fait partie de la poésie marocaine", soulignant que la tenue de ce type de rencontres constitue un hommage surtout aux précurseurs de ce genre poétique, notamment les poètes du malhoun et ceux qui ont excellé dans le domaine de la chanson.
Kadiri a relevé que le zajal marocain a été traduit dans plusieurs langues comme le français, l'anglais, l'italien ou l'espagnol, faisant remarquer que la particularité de la traduction vers la langue espagnole est qu'elle a concerné des recueils et non pas uniquement des poèmes comme ce fut le cas avec les autres langues.
De son côté, Ahmed Lemsyeh a souligné que la richesse et la diversité linguistique du Maroc se sont reflétées également dans le domaine poétique où les poètes marocains peuvent s'exprimer à travers des idiomes différents, dont l'arabe dialectal.
"Le zajal marocain a mérité, aujourd'hui, d'être considéré comme l'une des expressions poétiques confirmées sur la scène littéraire marocaine", a-t-il soutenu.
Lemsyeh a fait savoir que, même s'il est lié généralement à la tradition populaire, ce genre poétique a vu le jour dans les milieux culturels à Al Andalus avec des poètes célèbres comme Mohyi Eddine Ibn Arabi et Abou Bakr Ibn Kuzman.
Francisco Moscoso, professeur d'études arabes et islamiques à l'Université autonome de Madrid et auteur de la traduction en espagnol du recueil "L'oiseau de Dieu" (Pàjaro de Dios) de Mourad Kadiri, a relevé que cette rencontre est une occasion de mettre en exergue l'une des facettes de l'expression poétique marocaine.
"Ecrire de la poésie en arabe dialectal marocain est une preuve de la créativité et du niveau artistique de cet idiome", a ajouté Moscoso, qui a traduit également les recueils d'Ahmed Lemsyeh "Hal Wa Ahwal " (Estado y Estados) et "Ghzel Lebnat".
Mercedes Aragon Huerta, enseignante-chercheur à l'Université de Cadiz, a noté que le zajal marocain est un genre poétique exprimé par des intellectuels, des universitaires et des académiciens, ajoutant que le registre qu'il emploie est aussi riche que diversifié.
Cette rencontre a été marquée par la lecture de poèmes de Kadiri et Lemsyeh, ainsi que de leurs traductions en espagnol.
Les organisateurs de cette rencontre décrivent les deux poètes marocains comme les "représentants de la première et la deuxième génération des poètes populaires qui, depuis les années 1980, écrivent en arabe dialectal marocain et ont opté pour une poésie libre et contemporaine qui se démarque de la qasida classique ou du Melhoun qui ont une si large tradition au Maroc".
Né en 1965 à Salé, Mourad Kadiri, est membre de l'Union des écrivains du Maroc, de la Maison de la poésie au Maroc et du groupe "Poètes du monde".
Il est l'auteur de trois recueils, à savoir "Lettres de la paume de la main" (Hourouf Al Kaff-1995), "Filage de filles" (Ghzel Lebnat-2005) et "L'Oiseau de Dieu" (2007).
Ahmed Lemsyeh, né en 1950 à Sidi Smail (région de Doukkala-Abda), a occupé plusieurs fonctions dans des institutions culturelles marocaines et arabes et collabore avec diverses revues spécialisées, ainsi qu'avec des journaux.
Il est considéré comme l'un des rénovateurs de la poésie moderne marocaine et utilise aussi bien l'arabe classique que le dialecte marocain dans ses créations.
Il a commencé son itinéraire poétique en 1976 avec le recueil "Riyah: al-lati sata'ti" (Les vents qui viendront). Viendront ensuite une douzaine d'autres recueils, dont certains ont été traduits en espagnol comme (Hal wa-ahwal) (2003).
Les deux poètes marocains devront animer, ce jeudi, une soirée poétique à Grenade (sud), en compagnie de leur traducteur Francisco Moscoso.
26/5/2011
Source : MAP
Des mesures visant à faciliter l'opération "transit 2011" des Marocains résidant à l'étranger (MRE) ont été examinées lors d'une réunion tenue jeudi à Rabat.
Dans une déclaration à la presse, M. Khalid Zerouali, Wali, directeur de l'immigration et de la surveillance des frontières au ministère de l'Intérieur a indiqué que cette réunion "vient couronner une série de réunions sectorielles, et surtout celle de la Commission mixte maroco-espagnole chargée de l'Opération Transit 2011 tenue dernièrement à Madrid".
Quatre axes ont été examinés lors de cette réunion, a indiqué M. Zerouali, précisant qu'il s'agit de la "fluidité du trafic, en renforçant les infrastructures portuaires et les infrastructures d'accueil au niveau des aéroports et des points de passage, et la sécurité du transport, notamment la navigation maritime, en intégrant le contrôle technique au niveau des bateaux".
Il s'agit également de la sûreté puisque "les services de sécurité vont renforcer leurs moyens pour combattre le crime transfrontalier, qui risquerait d'entraver la bonne marche de cette opération, en plus de toutes les actions d'accompagnement et d'assistance".
M. Zerouali a salué, dans ce sens, le rôle fondamental que joue la fondation Mohammed V pour la solidarité, qui "constitue la pierre angulaire de cette opération et le secret de sa réussite".
Pour sa part, M. Mohamed Azami, coordonnateur de la Fondation Mohammed V pour la solidarité a évoqué les efforts fournis par cette fondation pour faciliter l'opération transit des MRE à travers son rôle de coordination.
"Les centres de la Fondation dans les différents points de passage accueillent les MRE et leur fournissent des prestations d'ordre médical et administratif, ainsi que des équipements et des interventions d'urgence en cas d'accidents", a-t-il rappelé.
La réunion a été une occasion de souligner l'importance pour tous les intervenants de continuer cette coordination et de garantir les ressources humaines et financières nécessaires à cette opération, a ajouté M. Azami.
La Fondation Mohammed V pour la solidarité a ouvert de nouveaux centres dans les aéroports d'Agadir et de Fès et à Bab Melilla, ainsi qu'une aire de repos à Tanger Med, qui répond aux standards internationaux, a-t-il précisé.
Cette aire s'étend sur une superficie de près de 10 ha, accueille plus de 1.200 véhicules et comprend toutes les dépendances nécessaires, a-t-il dit.
26/5/2011
Source : MAP/Au fait
L'Union européenne a proposé d'établir un "partenariat pour la mobilité" avec des pays partenaires de la politique européenne de voisinage dont le Maroc, pour renforcer la coopération dans le domaine de l'immigration.
Un document élaboré conjointement par la Haute représentante de l'UE pour les affaires étrangères et la Commission européenne, dans le cadre de la révision de la politique européenne de voisinage, préconise d'engager un "dialogue sur les migrations, la mobilité et la sécurité" avec ces pays, première étape vers un "partenariat pour la mobilité".
"Pour l'heure, parmi nos voisins, des partenariats pour la mobilité ont été mis en place avec la République de Moldavie et la Géorgie. La Commission estime que plusieurs pays voisins seraient de bons candidats pour ces partenariats. Elle visera la conclusion de négociations avec l'Arménie et se préparera à engager des négociations avec, notamment, le Maroc, la Tunisie et l'Egypte", indique le document.
Les partenariats pour la mobilité constituent des cadres globaux destinés à garantir une bonne gestion de la circulation des personnes entre l'UE et un pays tiers, souligne le texte.
Ces partenariats regroupent toutes les mesures qui garantissent aux deux parties les bienfaits de la mobilité. Ils permettent un meilleur accès aux circuits de l'immigration légale et renforcent les capacités de gestion des frontières et de lutte contre l'immigration clandestine.
Ils peuvent inclure des initiatives destinées à aider les pays partenaires à établir un système de gestion de la migration de la main-d'oeuvre, axé notamment sur le recrutement, la formation professionnelle et la formation linguistique, la reconnaissance des compétences, ainsi que le retour et la réintégration des migrants, ou à améliorer ce système.
Afin de renforcer la mobilité des citoyens entre les pays partenaires et l'UE, notamment celle des étudiants, des chercheurs et des hommes d'affaires, la Commission propose d'assouplir les formalités d'octroi de visas, et souligne les possibilités qui existent de renoncer à percevoir les droits de visa et de délivrer des visas à entrées multiples à ces catégories de personnes.
La coopération entre les écoles, la mobilité des étudiants et du personnel universitaire dans le cadre des programmes Erasmus Mundus, la coopération structurée en matière de modernisation des universités et la mobilité des jeunes seront également développées.
La mobilité de la main d'œuvre est un domaine dans lequel l'UE et ses voisins peuvent être complémentaires, indique le document, ajoutant que les contacts interpersonnels sont fondamentaux pour promouvoir la compréhension réciproque et le développement économique.
26/5/2011
Après avoir présenté d'ambitieuses propositions quant à la révision constitutionnelle, ils reviennent avec 50 projets de développement au Maroc..Suite
Mohamed Ameur, ministre délégué en charge de la communauté marocaine résident à l'étranger (CMRE), s'exprime sur l'après tremblement de terre en Espagne et les conséquences pour les MRE, les conditions des Marocains résidents en Libye ou encore sur la mise à place des listes électorales destinées, entre autre, à favoriser la participation de la diaspora marocaine aux prochaines échéances comme le référendum prévu en juillet…Suite
Le Parti populaire et Plataforma per Catalunya ont réalisé une poussée dimanche aux élections locales dans cette région traditionnellement à gauche.
Jouant sur le sentiment xénophobe, la vidéo électorale a porté ses fruits. On y voit des jeunes filles gambader librement dans les rues de la Catalogne d’aujourd’hui ; puis, sans transition, une projection en 2025 montre les mêmes gamines couvertes d’une burqa.
L’auteur de ce clip attisant le spectre d’un islam conquérant, Plataforma per Catalunya, seule formation officiellement raciste en Espagne, se frotte les mains. Jusqu’ici confidentiel, ce parti dirigé par Josep Anglada a multiplié son score par cinq : à l’issue des municipales de dimanche - véritable déculottée pour le Parti socialiste de José Luis Zapatero au niveau national -, il passe de 17 à 67 élus. Adeptes du porte-à-porte, les dirigeants de Plataforma per Catalunya n’ont pas froid aux yeux : ils militent pour une «Catalogne propre», proposant de retirer toute subvention aux étrangers, d’annuler les bourses d’études aux fils d’immigrés, et de faire payer aux consulats du Maroc et du Pakistan les dépenses que génèrent leurs ressortissants…
Badalone, troisième commune de Catalogne - proche de Barcelone -, ville aux 70 nationalités, en constitue un inquiétant laboratoire. Ces dernières années, dans cette cité-dortoir de 200 000 habitants, la droite nationaliste (quoique faible en Catalogne) y a gagné du terrain, en agitant l’épouvantail de l’immigration. Avec succès, puisque ce dimanche, ce bastion socialiste depuis trois décennies est tombé dans l’escarcelle du Parti populaire (PP, droite). Le vainqueur, Xavier Garcia Albiol, avait axé sa campagne sur l’insécurité et sur un «nécessaire contrat civil devant être signé par tous les étrangers».
«déloyale». Sur place, la poussée de cette réaction raciste est palpable. En particulier dans les quartiers d’Artigas-San Roc, La Salut ou La Pau, où le taux d’immigrés avoisine les 30%. Sur initiative du PP ou de Plataforma, beaucoup parlent de réduire la présence des immigrés. Artigas, par exemple, est un de ces anciens quartiers populaires qui, outre sa population d’ouvriers et de gitans autochtones, a assisté ces dernières années à un afflux massif de Marocains, et surtout de Pakistanais. Dans calle Chile, se succèdent le salon de coiffure Bismillah, des boucheries islamiques, la boutique vidéo Abbas. Les hommes arborent des salwar-kameez (robe) traditionnels, les femmes sont rares, on boit un peu partout du chai, le thé au lait. Se sachant fustigés, les Pakistanais se montrent discrets : le soir venu, les fidèles sortent furtivement d’une petite mosquée.
Ces quartiers constituent un terreau idéal : la plupart des «autochtones» sont eux-mêmes des émigrés, souvent âgés, venus du sud de l’Espagne dans les années 50-60. Et qui, en pleine crise économique (le chômage atteint ici 17%), voient d’un mauvais œil ces nouveaux arrivants. Cinq mille signatures ont été recueillies pour la fermeture de la mosquée, une modeste salle où se concentrent une grosse centaine de fidèles pakistanais. Angel Vendrell préside une association de quartier : «On a mis en place une école pour leur enseigner le catalan et l’espagnol. Mais il y a beaucoup de tension. Ici, les gens voient l’étranger comme une menace, une concurrence déloyale, une source d’instabilité. Dans la plupart des cages d’escaliers, les différences culturelles augmentent la défiance mutuelle.»
«pyromanes». Pour désamorcer les querelles de voisinage, les socialistes ont mis sur pied des «unités de bonne coexistence», les UCO. «Cinq patrouilles de ces médiateurs travaillent sans répit,explique le maire sortant, Jordi Serra. Des dizaines d’édifices posent problème, c’est vrai, mais cela reste une minorité. La droite veut s’implanter, alors elle donne des coups bas.» Khan, un grand Pakistanais qui tient deux commerces à Artigas, est inquiet : «Les gens ici sont plus raisonnables que ces pyromanes racistes, d’autant que nous sommes une communauté modèle ; on va jusqu’à installer à nos frais les lumières de Noël ! Mon inquiétude, ce sont ces immigrés qui entrent par effraction dans des logements réquisitionnés par les banques, parce que leurs propriétaires n’ont plus les moyens de rembourser les prêts immobiliers. Ces squatteurs ne respectent aucune règle, aucune norme, et les conflits de voisinage se multiplient. Avec, toujours, l’immigré dans le rôle du coupable.»
La crispation anti-étrangers s’est généralisée dans le reste de la Catalogne. La bourgade de Vic s’est ainsi opposée à l’inscription municipale de ses immigrés illégaux, une première. Au sud, dans la région de Tarragone, une demi-douzaine de mairies ont prohibé le niqab et la burqa dans l’espace public, même si ces accoutrements y sont très rares. Ces initiatives ont les faveurs du public. D’après l’institut Noxa, une grosse moitié des 7,5 millions de Catalans (tous partis confondus) estiment que le nombre d’immigrés est «excessif».
Le Parti populaire s’est engouffré dans cette brèche avec force. Parfois trop : récemment, le parti a lancé un jeu vidéo dans lequel une candidate, déguisée en Lara Croft, s’amuse à «tuer» des pions représentant… des étrangers. Face aux protestations, le PP a retiré ce jeu, et présenté des excuses.
25/5/2011, FRANÇOIS MUSSEAU
Source : Libération
Maroc se réfléchit, se reflète et se pense, à travers son cinéma»
Lors de la soirée de vendredi dernier, la cinéaste marocaine Leila Kilani a pu savourer la montée des marches au festival international du cinéma de Cannes, en compagnie des actrices vedettes de son film «Sur la planche», projeté dans la section «la Quinzaine des réalisateurs». Émotion et fierté étaient au rendez-vous.
LEILA KILANI : «Sur la planche» s'inscrit dans une urgence cinématographique, au même titre que mes films précédents. Sa programmation à la Quinzaine est une très belle étape : je suis à la fois heureuse et très fière que notre film représente le cinéma marocain. Mais d'une manière générale, mes films répondent à chaque fois à la nécessité impérieuse de fabriquer une image qui serait la nôtre. Ce qui est très possible au Maroc, grâce au volontarisme très fort qui s'y manifeste pour développer cet art. Nous avons compris que si nous voulons fabriquer nos propres images, il faut pouvoir les financer, ne pas avoir à mendier l'argent ailleurs. Le cinéma marocain vit un temps stimulant, plein de vitalité et créativité. Sont en train d'éclore des écritures singulières, multiples… et tellement libres.
Comment percevez-vous cette multiplicité de voix et de visions ?
D'un film à l'autre, chacun recherche sa propre forme de narration. Les réalisateurs mettent en scène, écrivent, décrivent, et cette écriture cinématographique n'est ni neutre ni transparente. Nous produisons nos images, cela a le mérite d'articuler l'individuel et le collectif. Des chroniques individuelles se constituent, une image collective s'esquisse… comme un espace commun, une communauté, un espace civique où se tissent des liens complexes, où s'exprime l'identité marocaine. Le cinéma présente à son public un miroir dans lequel il lui convient de se reconnaître et, surtout, de se reconnaître collectivement, en tant que communauté. Le Maroc se réfléchit, il se reflète et se pense, à travers son cinéma.
Pouvez-vous nous décrire votre sentiment en montant les marches du Festival de Cannes ?
Ce fut une émotion immense d'avoir pu le vivre avec les jeunes actrices. Que leur baptême de jeunes actrices se soit fait à Cannes est une féérie. D'ailleurs, toute première projection de film est un rituel très fort. Ce rituel signifie la naissance d'un film et le début de sa vie autonome. C'est un moment qui se vit collectivement. La présence des actrices pour la Première mondiale du film a toujours été une évidence, quel que ce soit l'endroit où a pu s'organiser cette Première. Cannes est un conte de fée… Il était impossible qu'elles ne puissent pas être là. Tout simplement impossible.
Dans «Sur la planche», 4 jeunes femmes de 20 ans travaillent pour survivre le jour et vivre la nuit. Pour vous, ces femmes sont emblématiques de la transformation du Maroc, mais aussi d'une transformation plus vaste, qui a lieu partout. De quelle manière avez-vous essayé de traiter cette ambivalence, si ambivalence il y a ?
...Quarante ans durant, sa légende de haut lieu «select» n'avait fait de Tanger qu'une métropole régionale atrophiée en récession économique. Aujourd'hui, Tanger la mal aimée, la délaissée, prend sa revanche : la ville de transit est elle-même en transition, charnière de deux mondes. Sitôt débarqués des porte-conteneurs, les produits (textiles, pièces aéronautiques ou automobiles, notamment) sont retravaillés par des armées d'ouvrières marocaines, puis expédiés vers l'Europe et les États-Unis, sans droits de douane ni quotas. Le miroir aux alouettes dont l'objectif déclaré est de créer 250 000 emplois d'ici à 2015 et de faire de la région la base arrière industrielle de l'Europe. Le Smig n'est qu'à 200 euros. De l'autre côté, une autre frontière : la Zone franche installée, proche, palpable, évidente, «à portée d'yeux», est cadenassée, interdite, accessible uniquement à ceux munis d'un «laissez-passer de travail». On peut la voir, l'approcher, mais pas y entrer. On ne peut que la fantasmer...
Qu'en est-il des personnages-femmes ouvrières ?
Venus du sud, les ouvriers arrivent par milliers, chaque année, des quatre coins du pays. Ils posent leur baluchon par terre à Tanger et s'agglutinent aux portes de la ville. Tanger, la Zone, les attire, comme un aimant. Ces filles pour moi sont un emblème de la transformation du Maroc, mais aussi d'une transformation plus vaste, qui a lieu partout. Ce sont des filles jeunes, qui arrivaient, qui changeaient la ville. Elles sont dans un rapport à l'espace, à elles-mêmes et au temps complètement différent. Cela passe par le travail, mais pas comme dans les années 1970. La manière qu'elles ont d'affirmer leur identité individuelle est totalement nouvelle, pas du tout idéologique. Ce flot d'humains qui vient buter sur cette ville, c'est un peu la Californie dans les années 1930 ou 1940, avec en toile de fond la récession qui frappe toute l'Afrique.
Le titre de votre film est très révélateur. «Sur la planche» peut être lu de différentes manières. Pour vous, quelle(s) forme(s)
cette planche peut-elle prendre ?
Le personnage principal de «Sur la Planche» est sur un tremplin, peut-être une planche à requins ou un plongeoir. C'est le déséquilibre qui mène à la dégringolade que raconte ce film.
Dans votre film, Tanger est un personnage à part entière. Vous avez un rapport particulier à cette ville ? Comment pouvez-vous le définir ?
Je suis originaire de Tanger, ville frontière regardant l'Europe depuis le détroit de Gibraltar. J'ai grandi les yeux rivés sur un cliché écorné que l'on effeuille avec la complaisance de la nostalgie : celui de «Tanger l'internationale», celle d'avant l'Indépendance, Tanger où se coudoyaient artistes et voyous, espions et librettistes, miséreux et affairistes.
Quand «Sur la planche» sera-t-il dans les salles au Maroc ?
Le plus rapidement possible. La sélection de la Quinzaine à Cannes s'est faite alors que les dernières étapes de post-production du film n'étaient pas encore achevées. C'est une copie numérique qui a été projetée. Nous devons kinescoper le film en 35 mm afin qu'il puisse être projeté dans les salles marocaines. Pour les festivals marocains, nous attendons la décision du comité de sélection du Festival de Marrakech. Mais il est encore trop tôt pour le savoir.
Quels sont vos projets d'avenir ?
Je prépare un documentaire sur les Révolutions arabes. Une fiction à Rabat et une autre à Paris.
Genèse du film
C'est en ces termes que Leila Kilani raconte l'histoire de la naissance de son film : «L'hiver 2001, je tournais mon premier documentaire. Je filmais les «brûleurs», les immigrés clandestins qui tentent de traverser la Méditerranée. Je les suivais sur le port, la nuit.
À l'aube, au moment où ils rentraient dormir, on découvrait ces armées d'ouvrières, ces colonnes compactes de femmes qui engorgent la ville dans un va et vient quotidien. Ce sont les hordes du «Maroc de l'intérieur», celles qui ont posé leur balluchon dans les collines des faubourgs, dont l'énergie, le mouvement, l'apparence offraient un contraste saisissant avec l'aspect très poétique, très onirique des brûleurs dans l'attente. J'ai commencé à discuter avec ces filles.
Leur obsession, c'est le travail stable sous contrat, l'usine. Le statut à conserver coûte que coûte. L'angoisse : se mettre à l'étal pour louer sa force de travail à la journée, être parmi les autres à attendre qu'un employeur vous désigne pour une tâche».
26/5/2011, Kenza ALAOUI
Source : Le Matin
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